Lu dans les pages des lecteurs de l’hebdo Marianne (décembre – janvier
2007)
In extenso:
«On aimerait bien rester de gauche…
Vivre dans une cité aux mains de jeunes violents et haineux n’aide pas à
garder un espoir généreux pour notre pays.Il y a une semaine, je retrouvais ma voiture défoncée pendant la nuit. Le
pare-choc et les phares avaient été percutés très probablement par un
amateur de rodéo, car nous vivons dans une cité où ce genre de choses
est plus qu’habituel. Étant descendu pour constater les dégâts, j’ai vu
arriver près de moi une voiture qui faisait des glissades au frein à main
et dont l’avant était embouti. Pour avoir eu le culot d’avoir arrêter
cette voiture en interpellant les deux jeunes Beurs à bord, le ton est
très vite monté, et ma femme qui m’avait rejoint, et moi nous sommes vu
insulter et menacer. Là encore rien que d’habituel, puisque chaque fois
que nous osons regarder ailleurs que par terre les insultes pleuvent,
sexistes, racistes et antifrançaises.
Évidemment, nous ne pouvons rien faire, bien que plusieurs voisins, aient
été témoins des faits (et d’ailleurs également insultés car traités
de lâches). Notre plainte à la police ne fait aucune description ni des
jeunes ni de leur véhicule. Les menaces étaient très crédibles. Il est
courant, lorsque nous arrivons dans la cité en voiture, que nous soyons
reluqués par des jeunes postés comme des vigiles. Sont-ils là pour nous
protéger, ou devons-nous au contraire les craindre ? Afin de mettre fin
aux saccages des halls d’entrée, ceux-ci vont bientôt être équipés de
serrures renforcées et de barreaux aux portes.Nous avons le sentiment d’être prisonniers de ces jeunes de la cité que
certains appellent voyous. Cela n’est pas politiquement correct pour des
gens de gauche de parler ainsi, mais c’est pourtant ainsi que cela se
passe, n’en déplaise à SOS racisme, que nous avons contacté mais qui n’a
pas donné de suite. Et de gauche nous voulons rester, de la même manière
que nous ne voulons pas devenir racistes ni antijeunes. Nous pensons que
c’est Sarkozy le voyoucrate puisque c’est grâce aux jeunes des cités et
à l’exaspération qu’ils ont suscitée qu’il a été élu. Comme me le
disait un des jeunes l’autre jour : «L’Algérie encule la France». En
effet, avec Sarko, on se fait enculer des deux côtés -pardon pour la
grossièreté mais celle-ci, à force de revenir dans tous les discours y
compris présidentiels, devient quasiment incontournable : d’un côté, la
misère nous tient à tel point que nous ne pouvons espérer quitter la
cité, et de l’autre on nous démolit notre voiture, notre seul moyen
d’évasion pour ne pas sombrer complètement. N’y a-t-il plus d’espoir dans
ce pays ?P. M.* , Nantes»
*Par pure soucis de sécurité, je n’ai pas reproduit le nom de celui qui a
écrit cette lettre ( contrairement à Marianne ).
(Merci à Auberon)