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La double élection de jeudi 7 février à l’Académie française s’est soldée par deux résultats sans vainqueur, aggravée par l’expression de bulletins blancs marqués d’une croix, signifiant le refus catégorique de tous les candidats en lice. Cet épisode pourrait bien marquer un tournant au sein de la vénérable institution créée en 1635 par le cardinal de Richelieu. Car il intervient au sein d’une assemblée décimée six académiciens décédés sont à remplacer. Ce vide n’a pas empêché les présents de refuser les sept candidats qui se présentaient. Les immortels ont ainsi voulu montrer leur esprit d’indépendance et signifier qu’ils n’entendaient pas agir sous la pression des événements et des médias. Mais leur «belle intransigeance» n’est pas sans poser des problèmes.

C’est que l’Académie française se trouve probablement à un tournant de son histoire. Elle est tenue de réfléchir à sa vocation dans la société contemporaine. Deux questions se posent à elle. Doit-elle devenir le conservatoire de personnalités incontestables ? Et comment peut-elle rester fidèle à sa mission originelle, qui consiste à veiller sur la langue française ?

Les scrutins de ces dernières années fournissent quelques précieuses indications. Certes l’Académie a pu donner le sentiment de ne «recruter» que des grandes figures de la République : l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing en 2003, après les anciens premiers ministres Michel Debré ou Pierre Messmer ; elle a aussi pu laisser penser qu’elle était sensible aux symboles, avec les réceptions d’un Franco-Chinois, François Cheng, ou de l’écrivain d’origine algérienne Assia Djebar (en 2005). Ces élections ont donné des idées à d’autres candidatures refusées des Libanais Salah Stétié et Amin Maalouf.

Actuellement, on évoque beaucoup les appétits académiques d’un Édouard Balladur ou d’une Simone Veil. Certains vont jusqu’à chuchoter que celle-ci n’aurait plus qu’à choisir son fauteuil. Les opposants à cette dérive «institutionnelle» rétorquent qu’il existe des organismes taillés pour ce profil de candidats : l’Académie des sciences morales et politiques. «L’Académie française n’est pas le Conseil économique et social», confient-ils. Car est-ce l’intérêt de l’Académie française d’accumuler à l’excès les anciennes gloires politiques fussent-elles prestigieuses ? Le Quai de Conti aime qu’au cursus politique s’ajoute une incontestable dimension philosophique et littéraire celle d’un Alain Peyrefitte ou d’un Edgar Faure (docteur en droit romain).

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