La «laïcité positive» est une notion floue qui permet d’occulter une réalité dérangeante et d’adapter la société française aux mœurs des derniers arrivants. Stéphanie Le Bars en analyse dans le Monde les limites. Elle estime cependant que les «nouvelles croyances religieuses» ne sont pas en mesure d’imposer leur conception de la société d’autant plus que des arrangements sont possibles dans le cadre d’une laïcité «décrispée». Son optimisme illustre la cécité ou la mauvaise foi des élites politiques et médiatiques.
Deux phénomènes traversent aujourd’hui les sociétés occidentales : une sécularisation massive marquée par un affaiblissement des “vieilles” religions présentes en Europe et l’apparition de “nouvelles” croyances, notamment l’islam. Cette nouvelle réalité n’est pas sans effet sur l’image et la place octroyée aux religions (ou celle qu’elles s’octroient) dans la sphère publique.
La France est un des pays les plus sécularisés, selon les sondages, une proportion de non-croyants évaluée entre 30 % et 40 % de la population et une pratique religieuse, chez les catholiques, en baisse constante. Dans le même temps, elle accueille aussi une des communautés musulmanes les plus importantes d’Europe. Normatif, à l’image du judaïsme, l’islam s’installe avec des codes et des règles visibles qui, régulièrement, heurtent le tissu social; d’où la perception générale d’un “retour du religieux“. Dans le même temps, les revendications identitaires les plus radicales, ressenties comme des intrusions inacceptables du religieux dans l’espace public, sont régulièrement corrigées par la loi ou la justice, chargées au passage de définir les nouveaux équilibres.
Désormais minoritaires et plurielles, les religions paraissent incapables d’imposer leurs vues, au niveau politique ou sociétal. Un siècle après la loi de 1905, «la séparation des Eglises et de l’Etat étant définitivement assurée tant au plan juridique que sociologique, il devient possible de prendre explicitement en compte, sans renier la laïcité, les apports spirituels, éducatifs, sociaux et culturels des religions», estime avec d’autres le chercheur Jean-Paul Willaime.
Au final pourtant, ce sont sans doute les ségrégations sociales, urbaines ou culturelles, plus que les identités religieuses, même réaffirmées avec radicalisme ou provocation, qui mettent en péril l’idéal républicain.(>> Le Monde)