Lu dans Le Monde :
New York est considéré comme la capitale de l’art depuis presque quatre décennies. New York a fait de l’art contemporain (AC) un “financial art”, dont la valeur s’élabore grâce à un jeu entre collectionneurs tout à la fois membres des conseil d’administration des musées et des fondations, propriétaires de supports médiatiques, de maisons de vente et de galeries.
C’est un produit financier haut de gamme, dont la dernière version, élaborée après l’effondrement du marché de l’art en 1990, ressemble aux produits dérivés créés au cours de ces mêmes années. Il est fondé sur un système qui recherche la sécurité avant tout. Comme pour ces derniers, ce qui compte n’est pas la valeur intrinsèque, mais la solidité du réseau qui garantit le produit.
New York a allié cette technique de fabrication de cotes à l’expression d’un dogme, élaboré dès la fin des années 1960, arrivé à maturité à la fin des années 1990 : “Les Etats-Unis sont la maquette du monde de demain, qui doit réunir dans la paix et la prospérité toutes les cultures.” Son message : “Venez créer en Amérique, venez vous faire reconnaître, vous mêler à toutes les cultures, vous mettre en concurrence. Vous rentrerez chez vous auréolés de gloire et visibles par le monde entier !”
New York n’est pas une capitale de l’art au sens où nous l’entendons en Europe : un lieu de culture, d’échanges intellectuel et artistique à caractère universel, où l’argent et la cote ne sont pas la finalité. Ce n’est pas le lieu privilégié d’une activité mystérieuse et désintéressée qui se nomme création. La notion de créativité, de production convulsive d’idées et de nouveautés propres à alimenter un marché spéculatif, une consommation de masse, base de l’économie. Le principe est : “Venez créer à New York, la production industrielle se fera dans le reste du monde. Nous comptons sur l’apport d’artistes venus de partout pour entretenir le nécessaire climat de créativité multiculturelle, fruit d’un grand métissage, source de prospérité universelle.”
(Merci à Denis L)