Extraits de Libération du 30/06/09. Avons remplacé le mot “sans-papier” par “clandestin”
Aujourd’hui, le jardin du quartier athénien de Saint Pantéléïmon est fermé avec une pancarte régulièrement arrachée et tout aussi régulièrement remise : «Entrée interdite aux étrangers». C’est là qu’ont commencé le 12 juin les premiers affrontements, des habitants prenant à partie les nombreux clandestins du quartier qui firent une demi-douzaine de blessés.
Un épisode symptomatique de l’exaspération croissante de la population grecque face à la présence des immigrés. Officiellement, 600 000 personnes. Mais certaines estimations donnent jusqu’à 2,5 millions d’étrangers, dont une majorité de clandestins, pour une population totale de 11 millions d’habitants.
Par solidarité, l’hospitalité des Grecs, ex-émigrés ou descendants de réfugiés, a été au début chaleureuse. «C’est de plein gré que je suis venue vivre il y a quatre ans dans ce quartier. Je croyais aux vertus de l’enrichissement par d’autres cultures et je voulais participer à l’éclosion d’une société multiculturelle», explique Anna, comédienne qui reconnaît maintenant que «la situation n’est plus tenable».
Les commerçants grecs ont déserté le quartier, les écoles fonctionnent désormais avec une minorité d’enfants grecs, les gens veulent partir et vendent leur maison au rabais. «Ce qui nous fait le plus mal pour nous qui étions imprégnés de l’idéal d’une société ouverte, laïque, et combattions l’influence de l’Eglise orthodoxe, c’est de voir l’emprise de la religion musulmane sur notre quotidien», explique cette femme de gauche : «La plupart de ces hommes, car ce sont des hommes en majorité, se réunissent dans n’importe quel lieu. Il m’arrive le matin de ne pas pouvoir sortir de chez moi, bloquée par des centaines de personnes agenouillées devant ma porte, en pleine prière. Pour nous les femmes, cela devient de plus en plus difficile de circuler.»
Depuis des mois, la «Chrisi Avghi» (l’aube d’or), un « groupuscule d’extrême droite » (© Libération) est à l’œuvre dans le quartier, montant les habitants contre les immigrés, faciles boucs émissaires de la crise. (…) Le groupuscule est allé plus loin en formant des milices qui traquent en dehors de toute légalité les calndestins, sous l’œil bienveillant de la police.
L’opinion publique grecque reste sceptique face aux mesures gouvernementales, comme l’exprime Anna : «J’en ai assez d’écouter les hommes politiques, de quelque bord que ce soit, en parler de façon théorique. Nous, c’est au quotidien que nous vivons ce “choc des civilisations”». (source)