Addendum 12/08/09
L’adjoint au maire de Royan a déclaré : « Nous avons été confrontés à une bande de jeunes de banlieue qui ont voulu se comporter comme chez eux. Ici, la population sédentaire est un peu âgée et leur sensibilité à l’insécurité est un peu plus exacerbée qu’en région parisienne.» (Le Parisien)
Noter, après le “sentiment d’insécurité” (©Jospin), l’apparition d’un nouveau concept : la “sensibilité à l’insécurité”.
A Royan, en Charente Martime, forains et sédentaires sont partis en expédition contre une bande qui entreprenait de terroriser la Tache verte et le Front de Mer
«C’est une expédition préventive, pas punitive… » Dans l’esprit de ce commerçant, le distinguo est clair. Pour qui aura assisté à l’opération montée par un groupe de commerçants forains et sédentaires contre une bande de jeunes gens originaires de la banlieue parisienne qui avait entrepris de racketter le secteur, les choses sont moins claires. Hier, dans un même mouvement, une trentaine de professionnels se sont rendus dans la petite rue Jules-Lehucher, devant le garage transformé en appartement qui servait de domicile à ces jeunes.
Les commerçants s’en sont pris à la façade, les contraignant à s’enfuir ou se barricader. La police et les CRS sont intervenus pour séparer les deux parties. Le conflit s’est délocalisé sur le Front de mer après une course-poursuite. Sept des jeunes gens ont aujourd’hui été reconduits en fourgon à la gare de Saintes, un huitième à la gare de Royan, deux sont en garde à vue dans le cadre d’une affaire d’agression et tentative d’extorsion de fond sur un commerçant du Front de mer. Un dernier est emprisonné depuis ce week-end à Saintes avant d’être jugé, aujourd’hui même, dans le cadre d’une procédure de comparution immédiate pour extorsion de fond et menaces.
Ce groupe de jeunes gens originaires d’Épinay-sous-Sénart (Essonne) sévissait depuis la fin juillet, logé un premier temps dans un squat de la rue de la Marine avant d’intégrer en « sous-location » l’appartement de la rue Jules-Lehucher. Ils se sont rapidement fait connaître des riverains de la place de la Tache Verte en multipliant les agressions et les menaces.
« Certaines personnes âgées n’osent plus sortir, explique l’un d’eux. Elles ne portent pas plainte par peur des représailles. J’ai découvert l’un d’entre eux endormi dans les parties communes de mon immeuble. Un autre en a trouvé un sur son toit. La petite-fille de l’une des riveraines en a rencontré un face à elle dans son propre jardin… Les dégradations et les petits vols se sont succédé, toujours avec un cortège de menaces et d’insultes. Ils ont agressé de jeunes saisonnières qui n’osaient plus rentrer seules le soir. Les gens n’en peuvent plus. »
Pour les riverains, ces jeunes gens travaillaient à installer un trafic de drogue. « Ils parlaient de s’installer à l’année, expliquent-ils. Nous avons fait circuler une pétition. Nous en avons appelé au maire, à la police et à la préfecture. »
Les commerçants n’étaient pas mieux lotis. Suivant un mode opératoire bien rôdé, la bande provoquait un incident. Puis exigeait sous la menace une compensation financière pour un incident pouvant aller du tee-shirt déchiré à la perte d’une liasse de billets. La « contribution » réclamée pouvait aller jusqu’à 1 000 euros. Plusieurs commerçants se sont ainsi fait purement et simplement racketter avec menaces de rétorsion en cas de plainte.
L’agression de Jean-Michel Lacourte, lundi soir, a mis le feu aux poudres. Ce cafetier du Front de mer a refusé de payer, il s’est fait tabasser. Les policiers sont intervenus. Ses agresseurs sont aujourd’hui en garde à vue. Il n’en garde pas moins un souvenir amer. « Nous avons pourtant averti les pouvoirs publics. Nous les voyions rayonner de plus en plus large, faisant preuve de plus en plus d’assurance. Ils cherchaient clairement à établir un territoire. Nos craintes n’ont pas été suffisamment prises au sérieux. »
Les commerçants et forains se défendent d’avoir voulu se faire justice eux-mêmes. Nul ne sait cependant jusqu’où les choses auraient pu aller en cas de bataille rangée. « Nous avons voulu donner un signe clair. Nous ne voulons pas de ça chez nous. » La justice, de son côté, risque de ne pas entendre les choses de cette oreille. Le retour à l’ordre acquis, certains des professionnels du Front de mer auront sans doute des explications à fournir sur leur comportement.
Didier Quentin ne décolère pas. Le député-maire de Royan a rapidement pris son téléphone pour s’entretenir avec le conseiller Police de Brice Hortefeux au ministère de l’Intérieur. « Nous devons faire en sorte que ce genre de choses ne se reproduise plus. Je veux donner un coup d’arrêt à ces activités qui nuisent à Royan et aux Royannais. La ville a assez souffert de son aura de “ville ouverte” dans les années 70. Il faut mettre un terme à tout cela. »
L’élu local aurait souhaité plus de présence policière dans le quartier « plutôt que sur les plages ». Sans approuver leur action, il regrette comme les commerçants ce qu’il estime être une prise en compte insuffisante du dossier par la Police nationale. Les forces de l’ordre, elles, entendent remettre les choses dans leur contexte.
« Notre mission nous impose d’agir dans un cadre législatif strict. Nous sommes intervenus dans le cadre de dépôts de plainte. Nous avons cependant affaire ici à une population difficile, qui sait très bien jouer avec la ligne blanche. Les comportements, la provocation, les insultes… Le tout avec une détermination et une organisation qui provoque un état d’insécurité permanent, avec une volonté d’intimidation. Tous ont des casiers judiciaires, mais cela ne nous autorise pas à faire n’importe quoi. Nous avons interpellé certains d’entre eux dans le cadre d’affaires de vols simples, de trafic de stupéfiants ou d’outrages. »
Les policiers ont ainsi pu appréhender le « meneur », samedi, dans le cadre d’une plainte pour menace et tentative d’extorsion de fonds contre les salariés d’un établissement de nuit de Saint-Palais-sur-Mer.
L’intervention des commerçants leur aura sans doute permis de faire le « ménage » plus rapidement. Lesquels n’en sont pas moins sortis de la légalité.
Sud Ouest – Voir aussi le Figaro et le Parisien
(Merci à Packc, f et falstaff)