Le peintre Gérard Fromanger raconte l’origine du tableau, au cours d’une rencontre avec Jean-Luc Godard en 1970.
” J’avais rendez-vous chez lui. On s’assit sur le côté du lit, et on resta comme ça en silence pendant des heures – pas un mot. Il ne dit rien, ne fit rien. Juste assis là. Après plusieurs longues heures, il me demanda : “Comment faites-vous ?” Je compris qu’il parlait de mes peintures, et je commençai à lui expliquer le processus. […] Je lui dis que pour peindre un drapeau, il faudrait trois rectangles : dans le premier du bleu, dans le second blanc (qui y était déjà), et dans le troisième rouge. Et il le fit lui-même, tout en ricanant comme un gosse et en racontant des blagues; il était tellement excité par ce qu’il faisait.
Je lui suggérai d’utiliser le rouge sur une grosse épaisseur, pour recouvrir le blanc et le bleu […] Il pensait que c’était tellement merveilleux qu’il n’arrêtait pas de m’interrompre pour le contempler. Il dit : “c’est génial, c’est génial, mais je voulais vous demander : n’avez-vous jamais pensé à faire des films ?”
Source : Jeune, dure et pure! Une histoire du cinéma d’avant-garde et experimental en France (Cinématheque Française/Mazzotta, 2001) (traduit)