Extrait de ‘Le Terrorisme Intellectuel’ de Jean Sevillia (p261-262):
« Etre ou avoir été de gauche, c’est normal. Etre ou avoir été à gauche de la gauche, c’est compréhensible. Etre ou avoir été de droite, cela impose de se justifier. Etre ou avoir été à droite de la droite, cela disqualifie à vie. Notre climat intellectuel, politique, moral et médiatique reste empreint de ce sinistrisme. [de “senestre” = gauche – ndlr]
Pourquoi la presse française, en janvier 2003, a-t-elle unanimement rendu hommage à Françoise Giroud ? Parce que celle « grande dame du journalisme» (selon la formule consacrée) a toujours été à gauche.
Pourquoi cette même presse a-t-elle eu tant de mal, en août 2003, à se résigner à ce que Bertrand Cantat ait battu à mort sa compagne Marie Trintignant ? Parce que le chanteur du groupe Noir Désir a manifesté contre Le Pen, pour les sans-papiers et le sous-commandant Marcos, autant de causes sacrées.
Que les journalistes français se situent à gauche, on le savait. Mais en 2001, un sondage publié par l’hebdomadaire Marianne nous a mieux renseignés à ce sujet.
D’après cette enquête, 53 % des journalistes comparent leur profession au métier d’enseignant (d’où, sans doute, leur goût de donner des leçons), 44 % d’entre eux considérant leur activité comme une vocation et 18 % comme une mission (vocabulaire religieux qui ne présage rien de bon dans un milieu généralement athée).
Leurs choix politiques, néanmoins, sont encore plus éclairants. Interrogés, un an avant le scrutin présidentiel, sur leur vote probable du premier tour, les journalistes répondaient dans cet ordre de préférence :
• Lionel Jospin (32 %)
• Noël Mamère (13 %)
•Jean-Pierre Chevènement (8 %)
• Arlette Laguiller (5 %), Robert Hue (5 %)
-> soit un sous-total de 63 % pour la gauche ,
• Jacques Chirac (4 %)
• Alain Madelin (1 %)
• et François Bayrou (1 %)
-> soit un sous-total de 6 % pour le centre et la droite. Jean-Marie Le Pen ne recueillant aucune intention de vote. Le reste du questionnaire montrait la même disposition à propos de diverses questions d’actualité.
“N’est-il pas étonnant au sein d’une démocratie, notait Philippe Cohen, que 6 % seulement des journalistes osent se déclarer électeurs de droite, quand on estime qu’au moins 50 % des Français votent ainsi ? Ou que 87 % d’entre eux s’affirment favorables à la régularisation automatique de tous les “sans-papiers” ? Il faudrait être quelque peu naïf, après cela, pour s’étonner du fossé, abyssal, qui se creuse entre la caste journalistique et la population” (Marianne, 23 avril 200l). »
Extrait de ‘Le Terrorisme Intellectuel’, Jean Sevillia (p261-262), éditions Perrin