La crise économique, qui a renforcé la crainte des Français de tomber dans la pauvreté, a engendré une prise de distance vis-à-vis de la consommation et un effritement de la confiance dans les marques.
Une étude d’Harris Interactive sur le consommateur de l’après-crise a été menée en ligne en mai 2009 en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis, auprès d’un échantillon de 2.400 personnes représentatif de chaque population, selon la méthode des quotas.
“Les Français considèrent que la crise est très profonde, il y a une désespérance française,” dit Laurent Habib, PDG de l’agence Euro RSCG C&O. “Les projections des Français très pessimistes renvoient à la crainte de la pauvreté,” ajoute-t-il. “Pour les Anglais et les Américains, c’est une crise financière, en France c’est une crise sociale.”
“Les Français ont peur de perdre leur emploi, qu’on privatise, qu’on ferme les entreprises en province,” déclare-t-il. “Tout ce qui désorganise l’ordre social est terrorisant.” Selon l’étude, sept Français sur dix pensent que les jeunes seront “plus touchés” par la crise que les autres.
L’étude met par ailleurs en lumière une “prise de distance” vis-à-vis de la consommation. Cette dernière reste “relativement stable” mais le consommateur se pose davantage de questions au moment de l’achat, qui doit être justifié.
En moyenne, dans les trois pays étudiés, 64% se demandent plus souvent “est-ce que j’en ai vraiment besoin?“, 60% “est-ce que je pourrais trouver l’équivalent moins cher?“, 59% “est-ce que je peux me le permettre?“, 47% “est-ce que c’est solide, de bonne qualité, est-ce que ça va durer longtemps?“.
Les consommateurs cherchent à faire des économies sans renoncer à la qualité. À cet effet, 69% sont prêts à remettre des achats à plus tard ou à renoncer aux marques.
Les ressorts de la consommation d’avant la crise, notamment l’innovation, ne sont plus valables, souligne M. Habib: “on se méfie de la technologie en elle même et de l’innovation pour l’innovation.”
En France, 68% des personnes interrogées trouvent que “les marques et les entreprises proposent des produits de plus en plus sophistiqués mais qui ne répondent pas aux vrais besoins des gens”.
Interrogées sur les pratiques des entreprises et des marques, 75% des Français disent attendre qu’elles développent des produits respectueux de l’environnement, 71% qu’elles proposent des produits de bonne qualité et 52% qu’elles traitent bien leurs salariés.
Seul un consommateur sur dix dans les trois pays a “tout à fait confiance dans les marques, c’est un défi terrible pour elles.”
Il faut que les marques “gagnent la bataille de l’utilité fonctionnelle, du meilleur rapport qualité prix. Mais il faut aussi qu’elles gagnent la bataille de la représentation sociale, des valeurs, de la représentation du monde, de l’engagement social et sociétal,” estime-t-il.
Par ailleurs, une étude de TBWA/Corporate Ifop publiée jeudi rapporte que 85% des Français se disent prêts à sanctionner les pratiques sociales, environnementales et financières des entreprises lors de leurs achats. L’étude a été réalisée du 3 au 5 juin auprès d’un échantillon de 1.015 personnes âgées de 18 ans et plus. AFP