La pleine réintégration de la France dans les structures de commandement de l’OTAN coûtera 650 millions d’euros d’ici à 2015. Ce chiffre, repris par un blog spécialisé sur les questions de défense, “Le Mamouth”, a été révélé le 28 octobre par le député socialiste Philippe Nauche lors des auditions – non publiques – de la commission de la défense de l’Assemblée nationale sur le budget 2010.
L’Afghanistan absorbe 95 % des sommes engagées par l’OTAN au titre de ses opérations extérieures. Le secrétaire général, Anders Fogh Rasmussen, a indiqué que des moyens supplémentaires sont nécessaires, mais concentrés à l’avenir sur la formation de la police et de l’armée afghanes. Ces moyens n’ont pas été chiffrés à ce jour, les membres de l’Alliance affichant une grande prudence sur un engagement supplémentaire, dans l’attente de la décision américaine sur le sujet.
Au 1er octobre, quatre pays membres (Allemagne, Norvège, Espagne et Italie) et l’Australie ont promis de doter de 221 millions d’euros le fonds spécial créé en 2007 (24 millions dépensés à ce jour en plus des engagements opérationnels) pour le soutien aux forces afghanes.
La source de cette information, a précisé le député, est l’état-major des armées. Sur six années, “entre 2010 et 2015, au moins 650 millions d’euros supplémentaires y seront consacrés. Ce sont des sommes importantes, qui n’avaient pas été inscrites dans la loi de programmation militaire.”
Après la décision, annoncée en août 2007 par le président Sarkozy, de réintégrer pleinement l’OTAN, l’heure des comptes est arrivée.
Deux officiers généraux français ont rejoint la structure de l’Alliance atlantique. En septembre, le général Stéphane Abrial a pris le commandement suprême allié de la “transformation” (la planification des moyens), à Norfolk, aux États-Unis, devenant le premier non-Américain à occuper ce poste. En juillet, le général Philippe Stoltz est arrivé à la tête d’un des commandements opérationnels européens à Lisbonne. Autour d’eux, les effectifs militaires français vont passer de 250 personnes en 2008 à 1 300 en 2012.
Le surcoût relève essentiellement de dépenses salariales : en régime de croisière, il sera de 70 millions d’euros par an pour les indemnités et les frais d’expatriation ; s’ajouteront 30 millions de cotisations supplémentaires versées à l’OTAN. Ce budget s’ajoute à la contribution financière annuelle de la France à l’OTAN (170 millions d’euros).
L’heure n’est pourtant pas à l’augmentation des dépenses. Les budgets de défense des 28 pays de l’Alliance sont à la baisse, sous la pression de la crise économique. De plus, l’OTAN elle-même connaît de sérieuses difficultés financières : son budget 2010 n’est pas bouclé. Les plus gros contributeurs (États-Unis, Allemagne, Grande-Bretagne, France, Italie) poussent à un plan d’économies.
Le débat a été ouvert par le secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, lors d’une réunion des ministres de la défense à Bratislava (Slovaquie), le 23 octobre : “Nous devons faire mieux avec ce que nous dépensons“, a-t-il lancé. La capacité de l’Alliance à projeter plus de soldats sur les opérations extérieures est en jeu.
Pour 2010, il manque 60 millions d’euros au budget des opérations militaires, qui dépasse 1 milliard d’euros. Avec l’engagement en Afghanistan, ces dépenses ont plus que triplé depuis trois ans. Manquent aussi 100 millions au budget d’investissement. En principe, plafonné à 640 millions, il a dérapé de 18 % en 2009. Surtout, l’OTAN a engagé pour 10 milliards d’euros de programmes, dont la moitié a déjà fait l’objet d’une décision collective. Or ils ne sont pas financés.
Mais la réforme divise. Estimant leur contribution directe élevée, la France, comme l’Allemagne, à la différence des États-Unis ou du Royaume-Uni, voudraient limiter les financements communs, pour “éviter de payer deux fois”. Les gros contributeurs souhaiteraient supprimer des structures et dégraisser des états-majors (13 000 militaires au total). “J’ai fait beaucoup d’économies au niveau national, il n’est pas possible de ne pas en faire au niveau international“, a fait valoir le ministre français de la défense, Hervé Morin. Mais les contributeurs moyens, comme la Pologne ou la Turquie, veulent au contraire développer les implantations de l’OTAN sur leur territoire.
Début 2010, ces questions viendront percuter de plein fouet la réflexion stratégique engagée par l’OTAN pour redéfinir ses missions dans les années à venir. Dans la préparation du futur “concept stratégique”, “il sera vain de proposer des pistes qui ne soient pas soutenues financièrement“, a indiqué au Monde le général Abrial. Ce dernier reconnaît que “la période qui vient sera très difficile“. Le Monde
(Merci à Λεωνίδας)