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Ce dimanche, Alexandre nous propose de découvrir “Le Cygne”, de Camille Saint-Saëns.

I/ Quelques mots sur l’Auteur :

Camille Saint-Saëns est né à Paris en octobre 1835 et mort à Alger en décembre 1921. Musicien reconnu dès son plus jeune âge (il donne son premier concert professionnel à l’âge de 11 ans), il impressionnera fortement ses contemporains tant pour sa maîtrise de l’orgue (il jouera à deux reprises à Windsor devant la Reine Victoria) que pour ses talents de compositeurs. Il gagnera par exemple à l’âge de 30 ans un concours musical devant un jury composé entre autre de musiciens de la classe de Verdi, Gounod, Rossini et Berlioz. Sa renommée et sa position sociale confortable lui permet de protéger des compositeurs plus jeunes qu’il juge talentueux, il défendra ainsi Wagner. Il défendra surtout Bizet, dont l’opéra “Carmen” actuellement l’opéra le plus joué au monde, se fait huer par toute la critique de l’époque.

Il est à noter que dans le contexte international de l’époque (montée générale du sentiment national en Europe, défaite française de 1870, création de l’Empire Allemand etc), Saint Saens comme nombre d’artistes de l’époque fait preuve de patriotisme. Il crée notamment une société de diffusion des oeuvres françaises et s’engage en 1870 dans la Garde Nationale pour tenter de stopper l’avancée des Prussiens sur Paris après que Napoléon III soit capturé avec son armée à Sedan par le futur Empereur d’Allemagne Guillaume II. Il mourra quasiment sur scène à l’âge de 86 ans et sera considéré par la critique étrangère comme le meilleur compositeur français du moment.

II/ De quoi ça parle :

Le Cygne est une oeuvre un peu particulière, car elle est jouée souvent seule, “pour elle-même” alors qu’elle est en fait tirée d’une autre pièce (archi-célèbre!) de Saint-Saëns, “le Carnaval des Animaux”. Nous reparlerons sans doute du “Carnaval des Animaux” une autre fois donc je ne m’attarde pas dessus, disons juste qu’ils s’agit d’une “suite” de 14 morceaux assez courts mis bouts à bouts qui représentent une “parade” d’animaux défilant comme pour Carnaval devant les spectateurs. Le Cygne fait partie de cette suite. Le Cygne essaie de représenter musicalement les mouvements d’un cygne sur l’eau et dans les airs.

Cette pièce est ce qu’on appelle un “Nocturne” (= “pièce pour la nuit”) , genre musical très apprécié à la période romantique (les célèbres “Nocturnes” de Chopin par exemple.) Il s’agit souvent d’un air lent, “triste”, poétique, visant à créer le maximum d’émotion chez l’auditeur. Ces courtes pièces étaient très jouées dans les salons de la grande bourgeoisie du XIXème car ils demandaient peu d’instruments et étaient une “animation” de la soirée.

III/ Quelques remarques musicales :

Vous avez seulement deux instruments dans cette courte pièce: un violoncelle et un piano. Le violoncelle est une sorte de “gros violon” de près d’un mètre 50 que le musicien utilise en posant le bas sur le sol et en le coinçant entre les genoux. Il assure ici l’air principal. Ecoutez attentivement les “notes longues” en fin de phrase, le musicien fait vibrer la corde un peu plus pour donner plus d’intensité. Il représente le cygne et son côté à la fois aérien, majestueux mais fragile. Le Piano, en arrière plan, représente l’eau sur laquelle se pose le cygne. Prêtez attention aux notes jouées très légèrement par le piano, la façon dont elles “tournent” en série de façon répétée, dont elles roulent et clapotent comme l’eau d’un lac sous un cygne.

Cette sensation aquatique est augmentée par des accords posés de façon quasi aléatoire dans le morceau (il sont très harmonieux mais ne sont pas posés à intervalles réguliers définis). Ils représentent selon moi les rayons de soleil se miroitant soudainement dans l’eau mouvante du lac. Remarquez les notes isolées, très aigües, qui “tombent” comme des gouttes d’eau de l’aile du cygne. Si vous êtes un mélomane confirmé (ou tout simplement attentif!), prêtez attention à ce qu’on appelle les “notes de passages” et autres notes “hors-accords” qui sont quasiment absentes de la musique “classique” au sens restreint du terme. Ces notes et sonorités, bannies par la musique classique car non conforme aux dogmes musicaux de l’époque (pour faire très court) sont réintroduits par les Romantiques qui s’appuient sur la musique classique pour explorer d’autres sonorités afin de mieux refléter les tourments, l’instabilité, les tensions de l’âme humaine.

IV/ Conseil d’écoute :

Cette pièce est courte (à peine plus de 3 minutes) et ne présente aucune difficulté particulière. L’air de base (le violoncelle) est suffisamment accrocheur dès les premières notes. Il faut en revanche prêter attention à tout le jeu du piano notamment ce côté “roulant”, “mouvant” qui symbolise les vagues et l’eau. Si nécessaire, augmentez légèrement le son, c’est selon moi LA chose qui fait toute la beauté de la pièce. Il y a beaucoup de choses à dire sur Saint-Saëns, sur d’autres oeuvres (l’exceptionnelle “Danse Macabre” notamment), sur sa façon de composer des pièces à la fois complexes et attirantes même pour un profane. Je présenterai sans aucun doute une autre oeuvre de lui. Mais pour le moment je vous laisse écouter et je reste bien sûr ouvert à toute critique constructive, à tout commentaire ou suggestion de votre part.

Bon Dimanche à tous !

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