Alimentées par les crédits à «taux zéro» de la réserve fédérale américaine, les grandes banques spéculent en Asie… construisant une bulle qui, selon les autorités chinoises et allemandes, pourrait bien précipiter l’économie mondiale toute entière dans une nouvelle crise !
Aux États-Unis, on prête gratis ! Depuis mars dernier, où la Réserve fédérale a ramené ses taux jusqu’à presque atteindre zéro, les grandes banques déversent des milliers de milliards de dollars dans les économies asiatiques.
Résultat : les monnaies et bourses de la région connaissent une croissance exponentielle… et totalement artificielle ! Une nouvelle «bulle asiatique» se forme et menace déjà de craquer.
«La politique monétaire américaine a gravement affecté les cotations, alimenté la spéculation sur les marchés d’action et de biens, tonnait le 16 novembre au Forum de la Finance Liu Mingkang, principal régulateur bancaire chinois. Elle a véritablement créé un nouveau risque d’empêcher la reprise de l’économie mondiale, notamment dans les marchés émergents.»
Depuis mars, si la Chine s’est quelque peu protégé de ces manoeuvres, la monnaie coréenne a pris 36,5% face au dollar. Un record battu par le real brésilien qui a subi une envolée de 41,5% sur la même période : de quoi plomber toute exportation… et l’éventuelle reprise qui va avec !
Ben Bernanke croyait réussir à calmer les turbulents asiatiques d’une petite déclaration publique : «nous portons la plus grande attention aux conséquences de taux de change sur les prix, assurait le patron de la Réserve fédéral américaine. Nous continuerons de veiller à tenir notre mission d’assurer le plein emploi et la stabilité des prix.» Manque de chance, les Européens aussi commencent à s’inquiéter.
Samedi 21 novembre, le Financial Times rapportait les inquiétudes du très expérimenté ministre des finances allemand, Wolfgang Schaüble : «plus probable aujourd’hui est un scénario dans lequel un excès de liquidités crée une nouvelle [espèce de] bulle spéculative mondiale.»
Or, l’Allemagne ne s’inquiète pas ici de la déstabilisation des économies asiatiques : si le mouvement enclenché continuait, l’Europe et son euro gonflé à bloc seraient les prochaines victimes de cette bulle !
A qui profite la spéculation ? A personne… sinon aux grandes banques ! Elles seules, ayant accès aux crédits de la Réserve fédérale peuvent se permettre, en usant du «carry trade» consistant à emprunter à taux zéro pour revendre ensuite au plus haut les placements effectués dans les monnaies cibles des marchés émergents profitables et de toucher les dividendes de ces opérations. De quoi constituer de beaux résultats pour Goldman Sachs qui, au bout de 9 mois d’activité seulement pourra verser 17 milliards de dollars de bonus à ses salariés.
Une jolie enveloppe accompagnée cette semaine des piètres excuses de Lloyd Blankfein, patron de l’omnipotente banque new-yorkaise, qui s’est excusé d’avoir accepté le sauvetage de son entreprise par l’Etat fédéral. Un bon coup de com mais qui n’efface pas le coup de force : sous prétexte d’avoir besoin de cash pour relancer le crédit, les banques ont repris leurs bonnes vieilles habitudes de chercher les profits faciles sans se soucier de couler au passage l’intégralité de l’économie.