Les gardiens de la paix ont beau avoir laissé leurs uniformes au vestiaire, ils ont tout de même conservé leur sens de l’ordre. Bien groupés sur le large trottoir qui borde le ministère des finances, les policiers en colère ne troublent pas l’ordre public et dénoncent d’une seule voix “la politique de chiffres” à laquelle ils se disent soumis. Une politique qui nous “éloigne du métier de police pour lequel on s’est engagé” témoigne un gardien de la paix des Yvelines, en bleu depuis vingt ans.
“Lorsque la brigade reçoit le message d’augmenter ses statistiques d’élucidation, il est plus rentable de se poser au coin d’une rue un peu roulante et de faire du contrôle routier que de traquer des délinquants. La hiérarchie préfère les bons chiffres.”
Jean, vingt ans de maison, estime que le tournant a eu lieu avec le millénaire : “Depuis le début des années 2000, nous n’avons plus les moyens de nos missions. Notre véhicule break affiche 160 000 km au compteur, poursuit Benoît. “Une partie de notre matériel informatique, c’est de la récup’ dans les bureaux d’une compagnie d’assurance qui a fermé boutique”, raconte un autre gardien de la paix.
Souvent le choix de ne pas intervenir est lié au rendement attendu. Une logique qui a créé des zones de non-droit, reconnaissent du bout des lèvres les policiers.”Des quartiers sont devenus imperméables aux forces de police. Si nous intervenons, cela dégénère, et nous devons mobiliser d’autres collègues. Et pour finalement quel résultat ? Les interventions ont un coût”, expliquent plusieurs membres d’une même brigade.
Source : Le Monde (merci à John)