En septembre dernier, le Knižní klub a décerné son prix littéraire à Lan Pham Thi, une jeune fille de 19 ans née de parents vietnamiens en République tchèque, pour son premier roman Cheval blanc, dragon jaune. Les membres du jury avait salué l’œuvre «d’un auteur de la deuxième génération des immigrés». Un auteur qui n’existait pas …
Le roman, choisi parmi tous les manuscrits inédits de fictions reçus par l’éditeur, décrit sa pénible enfance dans une ville de province, marquée par le racisme omniprésent des Tchèques (la communauté vietnamienne a commencé à s’installer en République tchèque dans les années 1980, lorsque celle-ci cherchait une main d’œuvre à bon marché).
L’heureuse vainqueur n’a pas pu venir chercher en personne le chèque de 2000 euros accompagnant le prix ; elle ne communiquait avec les journalistes que via e-mail, depuis la Malaisie, où elle serait entre-temps partie poursuivre ses études.
Suite à quelques doutes exprimés ici et là sur l’identité de l’auteur, la vérité éclate au grand jour trois mois plus tard : la jeune et exotique Lan Pham Thi n’a jamais existé.
Dans le brouhaha médiatique, les membres du jury de Knižní klub s’empressent alors d’assurer que le livre, avait été choisi pour ses qualités littéraires intrinsèques. Las, l’auteur véritable, Jan Cempirek, ne tarde à doucher cet argument, déclarant dans une interview pour le quotidien Lidove noviny qu’il s’agissait d’une suite de clichés:« Il s’agit d’un ouvrage schématique arborant une vision en noir et blanc du monde. En gros, le livre décrit plus ou moins ce qu’un Tchèque “ordinaire” imagine que les Vietnamiens de Tchéquie pensent. »
Il faut noter que le manuscrit, d’une longueur d’une nouvelle, ne remplissait pas les critères formels fixés par la maison d’édition (150 pages au minimum). Son style était dépouillé à l’extrême, les phrases étant composées quasiment que de noms et de verbes. L’ouvrage commence ainsi :
« Je suis tchèque. Je suis née ici. Et j’y mourrai probablement aussi. Je suis vietnamienne. Pour tout le monde. »
Source : Rue89 (Merci à Sodiaan)