Des élèves de 14 ou 15 ans répondent à la question : Qu’est-ce qu’être français ? Ils sont scolarisés dans un collège rural à Avoine (Touraine), comme Laure, Alexis et Boris, ou dans le collège du quartier de la Goutte-d’Or à Paris, comme Faïza, Djamel ou Eyele.
(…) Le Français est «blanc», déclare Alexis tout à trac. Personne ne conteste. Au collège Henri-Becquerel à Avoine, une petite ville d’Indre-et-Loire coincée entre Bourgueil et Chinon, le public scolaire est remarquablement homogène. Les quatre cents élèves sont des «Gaulois», des «jambon beurre», comme on dit dans les cités. «On n’a que deux ou trois jeunes originaires d’Afrique, assure le professeur Michaël Arrault. Ce sont des enfants adoptés.» (…)
Il est également «né en France», «parle français» et «respecte la loi». Roxanne, qui est née en Arabie saoudite et a vécu dix ans aux Etats-Unis, complète de sa voix douce, relevée d’une pointe d’accent américain : «Il est de mentalité française.» Ce qui, dans sa bouche, n’est pas un compliment…
Quand on entre dans la classe de Momcilo Markovic, professeur d’histoire-géographie au collège Georges-Clemenceau, à Paris, au coeur du «village» de la Goutte-d’Or, un quartier populaire du nord de la capitale, les parents d’élèves sont quasiment tous d’origine non européenne : africaine, maghrébine, asiatique… Et sept sur dix relèvent d’une catégorie socioprofessionnelle défavorisée.
Quand M. Markovic demande à ses élèves ce que signifie être français, Zacharia répond que «c’est se sentir égal aux autres, ne pas juger différemment un Français et un Arabe». «Liberté, Egalité, Fraternité, c’est ça “être français“», dit Faïza. «participer au développement de son pays, voter, payer l’impôt», annonce Eyele. Les étrangers ne payent-ils pas d’impôts ? demande le professeur. «Si, rétorque un élève. Donc, ils sont français !»(…)La discussion reprend. «Pourquoi les cloches sonnent-elles ici ?», demande Djamel. «Oui, abonde Zacharia, et on n’a rien à dire. La plupart des habitants, ici, c’est des Noirs et des Arabes, et l’appel à la prière est interdit.» Le professeur leur fait remarquer que la religion principale, en France, est le catholicisme, et que chaque village a son église.
Source : Le Monde