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Le plus haut gratte-ciel du monde, plus de 800 mètres, sera inauguré lundi dans l’émirat en pleins déboires financiers et immobiliers.

Les promoteurs entretiennent avec coquetterie le mystère sur sa taille exacte mais, avec plus de 800 mètres de haut, la tour Burj Dubai n’aura aucun mal à se hisser au sommet, puisqu’elle dépassera d’au moins 300 mètres l’actuel plus haut édifice du monde, Taipei 101 à Taïwan (508 mètres). La question est plutôt de savoir si cela ne sera pas le dernier grand chantier pharaonique, avant longtemps, de l’émirat du Moyen-Orient en pleine crise.

L’histoire raconte que l’émir de Dubaï, le cheikh Mohammed al-Maktoum, avait renvoyé à ses promoteurs le projet initial avec ses piètres 90 étages. «Nous pensions battre de peu le record détenu par la tour Taipei 101. Mais le client nous demandait chaque fois d’aller plus haut, sans nous fixer de limite», raconte l’architecte Bill Baker, du cabinet Skidmore, Owings and Merrill de Chicago, concepteur du gratte-ciel.
Résultat : le bâtiment inauguré lundi avec plus d’un an de retards cumulés, comptera 164 étages, 500 000 mètres carrés, 800 appartements, 50 étages de bureaux, un hôtel et une résidence de luxe Armani, plus de 50 ascenseurs grimpant jusqu’à 40 km/h, 35 000 personnes logées… Burj Dubai défie tous les ratios habituels. Ceux des prix aussi : les appartements vendus sur plan, depuis plusieurs années, ont atteint 40 000 euros le mètre carré, alors que le prix moyen local est tombé sous les 2 000 euros, après une chute de 50 % de l’immobilier l’année passée.
Coûte que coûte, les dirigeants du promoteur Emaar Properties, dont l’émirat détient un tiers du capital, se sont efforcés de boucler le projet, évalué à plus d’un milliard d’euros, malgré les déconvenues. Les faillites de plusieurs sous-traitants ont engendré des retards. Il s’agit surtout de faire bonne figure en plein marasme. Le 9 novembre, Cheikh Mohammed annonçait que la crise ne «dissuadera pas Dubaï de mettre en œuvre ses projets de développement».
L’inauguration de lundi permettra d’afficher un semblant de fierté retrouvée, après des mois plus que tendus. Elle ne réglera en rien les menaces financières qui pèsent sur l’émirat, victime de l’éclatement de sa bulle immobilière. Si Emaar échappe aux risques de banqueroute, ce n’est pas le cas de son rival Nakheel, empêtré dans les problèmes de solvabilité.
Filiale du conglomérat public Dubai World, ce dernier est derrière la construction des îles artificielles en forme de palmier ou de globe terrestre dont certaines s’enlisent dans le golfe Persique faute d’acquéreurs. Nakheel avait annoncé il y a un an le «report» d’un projet de tour d’un kilomètre de haut. Celui-ci ne risque pas d’être relancé de sitôt. La dette de Nakheel s’élève à 9 milliards de dollars. Il a absorbé 4 des 10 milliards de dollars prêtés par l’émirat voisin d’Abu Dhabi en décembre. Au total, l’ardoise de Dubai World atteindrait 40 milliards de dollars. Un moratoire devrait être négocié ce mois-ci.

Voilà qui redonne de l’actualité au «Skyscraper index» de l’analyste immobilier Andrew Lawrence. Selon lui, la construction de gratte-ciel records est un signe avant-coureur de dépression économique. En témoignent l’Empire State Building en 1929, la Sears Tower à Chicago, achevée à la veille du choc pétrolier de 1974, ou les tours Petronas de Kuala-Lumpur, au début de la crise asiatique en 1997.

Le Figaro

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