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Madame la Première Secrétaire,
Au-delà de la forme, particulièrement déplaisante, avec laquelle Monsieur Vincent Peillon, député européen, a refusé de participer au débat organisé hier [jeudi, ndlr] soir sur France 2 alors qu’il devait y représenter le Parti socialiste, cette désertion pose un grave problème de fond sur lequel je souhaiterais obtenir votre éclairage.
La télévision publique a, comme vous le savez, pour mission d’organiser et de faire vivre le débat public. Or, elle doit pour cela pouvoir exercer sa pleine liberté éditoriale dans le strict respect des règles du pluralisme fixées et contrôlées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel.
Dans ce contexte, soit l’attitude de Monsieur Peillon est une initiative personnelle et elle n’aura pas d’autre retentissement que celui que l’opinion voudra bien lui donner, soit elle est le fruit d’une décision réfléchie et concertée du parti politique dont vous avez la charge.
Les propos de Vincent Peillon qui a déclaré vous avoir informée de sa décision il y a plus de 48 heures et le soutien public que vous venez de lui apporter par voie de dépêche de presse le laissent entendre.
Le boycott volontaire […] menace le fonctionnement même du débat démocratique

Si tel est vraiment le cas, le boycott volontaire des antennes de France Télévisions par un élu socialiste menace le fonctionnement même du débat démocratique dans les médias audiovisuels qu’ils soient publics ou privés.
Je me permets en effet de rappeler que d’ici à quelques semaines nous allons entrer dans une période de campagne électorale au cours de laquelle la télévision publique va multiplier les émissions politiques alors même que les règles de pluralisme seront beaucoup plus contraignantes.
Vous comprendrez donc, Madame la Première Secrétaire, que les rédactions du groupe France Télévisions doivent être informées des intentions du Parti Socialiste à ce sujet.
Par ailleurs, dans le communiqué qu’il a publié pour justifier son refus de participer à l’émission « A vous de juger » alors même que celle-ci venait de commencer, Monsieur Vincent Peillon demande la démission de Madame Arlette Chabot, Directrice générale adjointe chargée de l’information, et pour faire bonne mesure, de tous les responsables de France 2 ayant organisé et autorisé la tenue de ce débat.
Un tel appel à la démission […] sans précédent depuis quelques dizaines d’années
Je ne mentionne évidemment pas les termes utilisés par Monsieur Vincent Peillon pour qualifier la télévision publique mais j’aimerais savoir si vous-même et le Parti Socialiste cautionnez cet appel à la démission collective. Un tel appel à la démission de responsables audiovisuels et de journalistes est je crois sans précédent depuis quelques dizaines d’années.
La télévision publique appartient à la Nation toute entière. Ses salariés, qu’ils soient ou non journalistes, donnent au quotidien et dans des conditions parfois difficiles le meilleur d’eux-mêmes pour informer les téléspectateurs.
Vous comprendrez qu’en tant que Président de France Télévisions je ne puisse tolérer qu’il soit porté atteinte à leur honneur et c’est pour cette raison que je rendrai cette lettre publique après vous l’avoir fait parvenir.
La vie politique a ses pratiques et ses usages. La vie démocratique, elle, a ses règles et a ses lois. Si l’un des principaux acteurs de cette vie démocratique refuse de les respecter c’est le contrat social lui-même qui vole en éclat.
Soyez assurée que je serais extrêmement heureux de pouvoir m’entretenir directement avec vous des suites de cette affaire.
Je vous prie de croire, Madame la Première Secrétaire, à l’expression de ma considération distinguée et de mes respectueux hommages.
Patrick de Carolis

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