Californie, Grèce, Portugal, Jamaïque… Les Etats se sont endettés jusqu’au cou pour préserver leurs grandes entreprises. Mais aujourd’hui, la crise a tout bouleversé, et les marchés estiment désormais que les Etats sont plus fragiles que les sociétés… qu’ils viennent pourtant de sauver.
L’agence de notation Standard & Poor’s a abaissé d’un cran (de “A” à “A-“) la note de la dette de la Californie. Prévenant que l’Etat le plus peuplé des Etats-Unis, représentant 13% de l’économie US et constituant la huitième puissance économique mondiale, pourrait se retrouver à court de fonds en mars, avec un déficit à plus de 20 milliards de dollars, l’agence a annoncé qu’elle pourrait de nouveau sévir au cours des six à douze prochains mois. Si la Californie a amplement profité de l’effet “subprimes” du temps de leur splendeur, aujourd’hui, elle subit toutes les conséquences de l’implosion du marché immobilier.
Jeudi, S&P a aussi abaissé les notes de dette de la Jamaïque, à des niveaux correspondant à un défaut de paiement partiel !
Plus proche de nous, la Grèce inquiète son monde. Dans un rapport publié mardi, la Commission européenne a épinglé le pays pour les “graves irrégularités” détectées dans la présentation de ses comptes. Le gouvernement hellène aurait en effet communiqué de fausses données à l’Europe, en plus de n’avoir pas respecté les règles comptables les plus élémentaires. Rien que ça.
Mercredi, l’agence de notation Moody’s a pointé du doigt le Portugal, estimant que le pays risquait “une mort lente” économique. Et les annonces de ce genre risquent de s’enchainer.
Mais que se passe-t-il, au juste ? C’est simple. L’économie mondiale est moribonde et les Etats s’endettent à la place des entreprises. Mais pourquoi donc ? Parce que le risque de faillite d’un Etat est bien moindre que celui d’une société… croyait-on.
Mais la situation est en train de changer du tout au tout. Le Financial Times a en effet relevé mercredi que selon les indices Markit, pour la première fois, le risque de défaut sur les obligations des Etats est désormais plus élevé que celui sur les titres de dette des entreprises.
En clair, le marché estime désormais que le risque de faillite des Etats européens est devenu supérieur à celui de leurs sociétés !
Les investisseurs craignent en réalité que les Etats soient incapables de réduire leur dette dans un futur proche. Ils exigent aujourd’hui quasiment plus de garantie d’un Etat que de ses grandes entreprises, qui sont pourtant en général moins bien notées.
Et on arrive à cette situation ubuesque : les investisseurs doutent plus de la santé des Etats que de leurs banques… qu’ils ont pourtant sauvé l’année dernière ! Et qui sabrent le champagne en ce moment même, célébrant les rémunérations record – 145 milliards de dollars – versées au titre de l’année 2009 aux Etats-Unis.
Les mots ont un sens