Tribune libre de Paysan Savoyard
Selon les immigrationnistes, la France étant un pays riche, elle aurait le devoir moral de partager cette richesse et d’accueillir au moins une partie de ces immigrés qui fuient la misère. Cette argumentation « humaniste » part sans doute d’un bon sentiment : elle n’en est pas moins fallacieuse. Nous voulons ici montrer qu’au contraire la France n’a pas les moyens de supporter la charge de l’immigration massive.
1. La France est désormais l’un des « pays riches » les moins riches
Depuis plus de vingt ans en effet, la richesse du pays n’augmente plus que faiblement :
Le revenu annuel par habitant (ou PIB par habitant, qui est actuellement de 29 000 euros environ) n’enregistre en effet qu’un taux de croissance faible. De 2000 à 2008 le PIB national (en volume) a augmenté en moyenne de 1,9 % par an. Or la population augmente, elle, de 0,6 % par an. Le taux de croissance du PIB par habitant n’a donc été sur la période que d’un peu plus de 1% par an. C’est là le premier constat d’importance : la croissance de la richesse nationale est faible et elle est en partie annulée par la forte augmentation de la population (due d’ailleurs précisément à l’immigration).
De ce fait, dans le classement des pays riches, la place de la France ne cesse de régresser, par rapport notamment à la plupart de ses partenaires européens :
C’est ainsi qu’en 1997, pour un PIB par habitant moyen en Europe de 100 (exprimé en « Standard de pouvoir d’achat » c’est-à-dire en éliminant l’effet des différences de niveaux de prix entre pays afin de permettre une comparaison pertinente), le PIB français était de 114 (c’est-à-dire qu’il était supérieur de 14 % à la moyenne européenne). En 2008, il n’est plus que de 107 (7 % supérieur à la moyenne européenne).
Le PIB par habitant français (107, donc, en 2008) est nettement moindre que celui des Pays-Bas (134), du Royaume-Uni (117), de l’Allemagne (116), de la Belgique (114) et des différents pays d’Europe du Nord. Parmi les pays européens « riches » (c’est-à-dire les pays fondateurs de l’UE, le Royaume-Uni et les pays scandinaves), la France, en termes de PIB par habitant, est avant-dernière : seule l’Italie fait encore moins bien.
2. Les importants déséquilibres que présente l’économie française font courir à moyen terme le risque d’une chute brutale du niveau de vie
La situation économique de la France enregistre en effet trois déséquilibres importants et dangereux :
Le chômage se situe à un niveau élevé depuis maintenant 35 années consécutives : il représente selon les moments, en fonction des fluctuations de la croissance du PIB, entre 7,5 et 11 % de la population active. En 2009 le nombre officiel des chômeurs est, remonté à 2,5 millions soit 9 % de la population active. Encore faut-il préciser qu’il ne s’agit là que des chômeurs au sens strict. Le nombre des personnes qui n’occupent pas de véritables emplois est en réalité beaucoup plus élevé. En effet un grand nombre de personnes n’occupant pas d’emploi ne sont pas comptabilisées comme chômeurs parce qu’elles bénéficient des mécanismes de « traitement social » du chômage : préretraités ; dispensés de recherche d’emploi en raison de leur âge ; stagiaires en reconversion ; bénéficiaires du RMI non inscrits au pôle-emploi… D’autres personnes n’occupent pas de véritables emplois mais des « emplois-aidés » financés par les budgets publics, comme les emplois-jeunes. D’autres encore ne parviennent à travailler qu’à temps partiel alors qu’elles souhaiteraient travailler à temps plein. Ces personnes sans emploi véritable mais non comptabilisées comme chômeurs constituent ce que l’on appelle « le halo du chômage ». Au total, en additionnant le chômage officiel et les différents cercles du halo du chômage, ce sont environ 5 millions de personnes qui sont en marge ou en dehors de l’emploi, soit 18 % de la population active.
Outre son effet désastreux sur le « moral » collectif et la solidité du « tissu social », la situation permanente de chômage massif contribue au second déséquilibre français, celui des finances publiques.
Les finances publiques sont en mauvais état, elles aussi, depuis plus de trois décennies. Le chômage, donc, constitue l’un des principaux facteurs de la dégradation : en raison du poids du financement du traitement social du chômage ; mais également parce que les pouvoirs publics ont choisi ces dernières décennies de créer de nombreux emplois de fonctionnaires afin de limiter l’ampleur du chômage. Mentionnons les deux autres causes importantes de la dégradation des comptes publics : les coûts considérables engendrés par l’immigration ; et la baisse de la fiscalité sur les hauts revenus et les patrimoines élevés, conformément à la logique libérale mise en œuvre en France et dans l’ensemble des pays occidentaux depuis une trentaine d’années.
La situation est la suivante. Le budget de l’Etat ainsi que celui de la sécurité sociale sont en déficit chaque année depuis le milieu des années soixante-dix. Ces déficits ne cessent de croître. Dans ces conditions la dette publique enregistre une augmentation continue, qui s’est fortement accélérée ces dernières années (c’est ainsi qu’en seulement 8 ans la dette publique est passée de 64 % à 74 % du PIB).
Cette situation peut être dangereuse à terme. Dans une situation où l’endettement ne cesse de croître, en effet, il peut se trouver un moment où les prêteurs en viennent à douter de la capacité de l’Etat de rembourser et refusent de prêter davantage : s’il se produisait, ce cas de figure obligerait les pouvoirs publics à réduire drastiquement le niveau de vie du pays et des ménages (une autre option offerte aux Etats endettés est de déclencher un processus de forte inflation, qui aurait également d’importants effets négatifs sur le niveau de vie ; la monnaie étant désormais européanisée, cette stratégie supposerait une décision des principaux gouvernements européens).
La France enregistre, enfin, depuis plusieurs années maintenant (2005), un déficit de ses échanges extérieurs : les importations de biens et de services sont supérieures aux exportations. Cette situation résulte notamment du fait que les entreprises des pays développés, confrontées à la concurrence des pays à bas coûts, ne disposent plus d’une compétitivité suffisante (ce qui les incite d’ailleurs à délocaliser ; rappelons que cette situation de mondialisation de l’économie et des échanges a été voulue et organisée par la classe dirigeante des pays occidentaux à partir de la fin des années 80). Or une situation de déficit des échanges d’un pays n’est pas soutenable durablement : le déficit entraîne en effet un besoin d’endettement qui peut, là encore, provoquer une défiance et une défection des prêteurs. Si la chose se produisait, les pouvoirs publics seraient contraints de réduire drastiquement le niveau de vie du pays afin de limiter les importations.
3. La classe des salariés, groupe central de la société française, voit désormais sa situation se dégrader de façon continue
Nous avons vu plus avant que le PIB par habitant augmentait peu et qu’il était plus faible que celui de la plupart des pays ouest-européens. Encore faut-il souligner que ce PIB par habitant est une moyenne, qui cache le fait que la situation des trois principales couches de la société française n’a pas du tout évolué de façon identique.
La couche « la moins favorisée » constituée en particulier des personnes d’âge actif qui, de façon durable, ne travaillent pas (chômeurs de longue durée ; personnes n’ayant jamais travaillé…) a vu, ces trente dernières années, sa situation s’améliorer de façon régulière (même si elle reste moins bonne que celle des autres groupes). De multiples allocations ont en effet été créées et n’ont cessé d’être revalorisées : RMI, RSA, ASS, allocations logement, allocations personne isolées, allocations familiales sous conditions de ressources, CMU …. Il est désormais possible de percevoir durablement un revenu sans travailler (cette situation d’assistanat était impossible il y a encore trente ans ; il convient également de signaler que certaines des personnes percevant ces revenus d’assistance les cumulent avec le travail au noir et les revenus tirés de trafics et de la délinquance).
A l’autre extrême, les membres de la couche supérieure de la société (cadres supérieurs, dirigeants des entreprises, professions libérales, détenteurs de patrimoines…) ont vu leur situation s’améliorer fortement, grâce aux mesures de baisse de la fiscalité sur les hauts revenus, les patrimoines et les bénéfices des entreprises prises ces dernières décennies (baisse du taux supérieur de l’impôt sur le revenu ; dispositifs divers permettant d’échapper au barème ; baisse du taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés… ; la dernière mesure d’allègement significatif à destination des membres de la couche supérieure a été l’introduction d’un « bouclier fiscal »).
En revanche la situation de la classe des salariés, qui constituent le groupe central (le plus nombreux) de la société française, a commencé, depuis une vingtaine d’années, à se dégrader de façon continue. Les salariés ont été touchés par les évolutions négatives suivantes :
La vie professionnelle des salariés du secteur privé est désormais fréquemment ponctuée de périodes de chômage.
Le poids des impôts et cotisations pèsent de façon croissante sur les salariés. En effet les membres du groupe ne travaillant pas sont souvent exonérés de la plupart des prélèvements obligatoires (c’est ainsi que la moitié des ménages ne paient pas d’impôt sur le revenu). Les membres de la couche supérieure ont bénéficié eux, comme nous venons de le dire, d’un allègement continu des prélèvements qui les concernent.
Enfin le groupe des salariés, comme l’ensemble des actifs, a commencé à être touché par les mesures de baisse de la protection sociale introduites depuis vingt ans pour limiter les déficits (allongement de la durée de cotisation pour percevoir une retraite à taux plein dans le secteur privé ; création de franchises sur les dépenses de santé et de déremboursements divers…).
Au sein du groupe central, seuls les salariés du privé sont concernés par le chômage. En revanche la concentration des prélèvements obligatoires sur les salariés ainsi que la baisse de la protection sociale qui est désormais engagée, sont des phénomènes qui concernent l’ensemble des salariés qu’ils relèvent du secteur privé ou du secteur public. Signalons que la situation, globalement meilleure, des salariés du public risque d’être remise en cause par les projets du gouvernement (diminution du nombre des fonctionnaires ; introduction de mécanismes de licenciement au sein de la fonction publique ; remise à plat du régime de retraite).
Le processus de dégradation de la situation des salariés, amorcé donc depuis environ deux décennies, est pour l’instant resté modéré. Mais nous n’en sommes qu’au début. La croissance en effet restera faible et il y a des limites, comme nous l’avons dit, à l’emprunt : l’Etat sera donc fortement tenté de réduire les dépenses de protection sociale et l’étendue des services publics. Le groupe central de la société française n’a pas fini de souffrir.
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La France n’est donc plus si riche, et la majorité de sa population – les salariés – assiste désormais à un processus continu de dégradation de sa situation. Dans ce contexte, la France n’a pas les moyens d’accueillir de nouveaux immigrés. Le nombre de ceux qui sont présents sur le territoire est déjà bien trop élevé. Si la France laisse ses portes ouvertes, elle met en danger les bases mêmes de son système de protection sociale et de services publics.
Signalons au surplus que de nombreux besoins collectifs sont actuellement insuffisamment couverts par les interventions publiques. Citons la situation des régions désindustrialisées ; celle des régions rurales désertifiées, qui devrait rendre nécessaire une aide fortement accrue aux paysans de l’agriculture traditionnelle et aux petits commerces ; la situation des personnes âgées, dépendantes et isolées ; la situation des régions sous dotées en équipement médical ; la situation dégradée du patrimoine architectural et paysager…). C’est à ces différents « chantiers » que nous devons consacrer nos ressources.
Nous n’avons pas les moyens, redisons-le, de prendre en charge les pays et les populations des continents « pauvres ». Avant de songer à faire la charité, une famille doit consacrer son énergie et ses ressources à l’éducation et l’insertion professionnelle de ses enfants : il en va de même pour les nations. Notre pays doit s’occuper en premier lieu de sa propre population. S’il la néglige pour se consacrer au sort de personnes venues de l’étranger, un Etat bouleverse l’ordre naturel des choses et ses dirigeants se placent en situation de trahison. Si nous continuons, nous serons ruinés et il n’y aura plus à partager que la misère et son corollaire, la violence.
Sources : http://www.insee.fr/fr/ffc/figure/CMPTEF08145.xls (PIB par habitant dans l’UE) ; http://www.indices.insee.fr (chômage; dette publique ; échanges extérieurs) ; http://www.insee.fr/fr/ffc/ipweb/ip1266/ip1266.pdf (pour l’évolution du niveau de vie. Le document montre notamment que « les 10 % des personnes situées aux deux extrêmes de la distribution des niveaux de vie ont vu la part qu’ils détiennent s’accroître, alors que la part détenue par les déciles intermédiaires a diminué »).