Le président du Conseil français du culte musulman (Cfcm), Mohammed Moussaoui, déplore que l’Islam, «deuxième confession de France depuis près de deux siècles», soit «assimilée à une présence étrangère» et affirme que le Cfcm ne revendique que le droit «à l’indifférence».
(…) Malgré une littérature abondante sur l’islam, l’histoire des musulmans de France reste sous-considérée, à tel point que, dans l’imaginaire collectif, la présence musulmane sur le sol national est assimilée à une présence étrangère qui vient perturber le paysage français.
L’histoire du Moyen Age, telle qu’elle est enseignée, réduit souvent la présence musulmane en France aux conflits entre sarrasins et chrétiens. Le riche patrimoine musulman, notamment dans le sud de la France, se trouve de fait occulté. Ni la mosquée de Narbonne (VIIIe siècle), ni les traces du château de Fraxinet dans le massif des Maures (Xe siècle), ni les stèles funéraires de Montpellier (XIIe siècle), n’ont été considérées à leur juste valeur.
D’autre part, la contribution de la civilisation arabo-musulmane, à travers ses scientifiques, ses philosophes ou ses maîtres spirituels, à l’essor de l’Europe en général et de la France en particulier a été parfois injustement diminuée et caricaturée.
Les sacrifices des musulmans lors des première et seconde guerres mondiales ainsi que leur participation à la construction du pays lors des “trente glorieuses” n’ont pas reçu la considération à laquelle ils avaient droit. (…)
L’islam a pu pendant longtemps être pratiqué paisiblement en France par des milliers de croyants sans que cela constitue un quelconque problème. (…)
Il est intéressant de noter, par exemple, que le CFCM a clairement affiché son opposition au port du voile intégral sur le territoire national. Il a fait savoir par ailleurs son opposition à la promulgation d’une loi qui viserait son interdiction dans l’espace public. (…)
Cette expression du CFCM, amplement justifiée, n’a malheureusement pas été suffisamment entendue. Nous ne sous-estimons pas l’incompréhension, voire le rejet, que peuvent susciter certaines pratiques, au demeurant, marginales. Mais nous pensons qu’il est plus judicieux de se pencher sur le mal-être de ces enfants de la République qui tendent à se replier sur eux-mêmes, parce qu’ils peuvent se sentir non reconnus, non considérés et discriminés.
Deuxième confession de France depuis près de deux siècles, la religion musulmane n’a jamais composé une entité monolithique. Ce manque d’organisation va d’ailleurs totalement à l’encontre du fantasme de domination (…)
Source: Le Monde