Baisse inattendue du moral des ménages, remontée du chômage et regain de tension sur les prix laissent augurer d’une rechute de la croissance française au premier trimestre, après une embellie, fin 2009, qui détonnait au sein de la zone euro.
Le redressement de l’opinion des ménages sur la situation économique, amorcé en octobre 2008, a connu un coup d’arrêt en février.
L’indicateur résumé de l’opinion des ménages a reculé de trois points en février, revenant à -33 et retrouvant ses niveaux de l’automne 2009, selon les données publiées jeudi par l’Insee.
Vingt économistes interrogés par Reuters s’attendaient à une poursuite de l’amélioration du moral des ménages et prévoyaient en moyenne un indicateur résumé à -28.
“Trois éléments peuvent expliquer le moindre optimisme des ménages : les revalorisations de salaires et de minima sociaux ont été très modestes en ce début d’année, les mesures exceptionnelles du plan de relance notamment sur l’impôt sur le revenu et l’indemnisation de nombreux chômeurs touchent à leur fin tout comme le mécanisme de la prime à la casse qui a soutenu les achats d’automobile“, explique Exane BNP Paribas.
Les ménages, particulièrement pessimistes sur l’évolution passée de leur niveau de vie et leur situation financière personnelle, se montrent aussi moins enclins à réaliser des achats importants et plus soucieux d’épargner.
“La volonté d’épargne devrait être d’autant plus renforcée que le flou planant sur la réforme des retraites a un caractère relativement anxiogène, tout comme les engagements gouvernementaux à geler les dépenses publiques“, estime Exane BNP Paribas.
Les ménages sont moins inquiets quant à l’évolution du marché de l’emploi, alors que le rythme d’augmentation du chômage s’est infléchi depuis plusieurs mois.
Le nombre de demandeurs d’emploi est toutefois reparti à la hausse le mois dernier, avec une progression de 0,7% (+19.500 personnes), selon des chiffres publiés mercredi par le ministère de l’Economie et Pôle Emploi, après la période de réalisation de l’enquête mensuelle de conjoncture auprès des ménages.
Les consommateurs français sont aussi un peu plus optimistes quant aux évolutions de prix, en dépit du léger regain des tensions inflationnistes qui devraient peser sur leur pouvoir d’achat.
Les prix à la production en France ont ainsi progressé de 0,7% au mois de janvier sous l’effet principalement de la hausse des cours du pétrole accrue par la dépréciation de l’euro.
Ils sont repassés en territoire positif en glissement annuel (+0,4%) pour la première fois depuis novembre 2008.
“La dégradation du moral des ménages intervient après un important repli des dépenses en produits manufacturés au mois de janvier“, rappelle Frédérique Cerisier, économiste à la banque BNP Paribas.
“La diminution de la prime à la casse et la forte chute attendue des achats d’automobile, après un premier repli de 16,7% en janvier par rapport à décembre, pourraient conduire à un repli de la consommation totale des ménages au premier trimestre“, prévient-elle.
La consommation des ménages a progressé de 0,9% au quatrième trimestre, en France, par rapport au trimestre précédent, contribuant à la hausse de 0,6% du Produit intérieur brut qui contrastait avec la stagnation de l’économie allemande et la quasi-stagnation de la zone euro sur la même période.
“Dans le contexte d’une année 2010 de transition, entre la relance de 2009 et le resserrement budgétaire de 2011, un retrait trop précoce du soutien à l’économie risque de peser fortement sur le comportement des ménages” et donc, sur la croissance, prévient Exane BNP Paribas.