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Par le Père Augustin

25 mars-25 décembre : de la fête de l’Annonciation (où l’ange Gabriel annonce à Marie qu’elle sera la mère du Messie) à la fête de Noël, il y a neuf mois comme de juste.
Le récit de l’Annonciation dans l’Evangile de Luc est un chef d’œuvre absolu. Avec l’ange nous entrons chez Marie de Nazareth, « une Vierge fiancée à un homme de la Maison de David dont le nom était Joseph ».
Les premières paroles de l’ange s’adressent à elle : « Salut comblée de grâces, le Seigneur est avec toi ».

Comblée de grâces : kecharitoméné en grec : cette expression curieuse devient comme le nom propre à Marie, la manière dont l’ange la désigne, sans employer son prénom. Cette plénitude de grâce en Marie, l’Eglise l’appelle l’Immaculée conception, le fait que le péché n’ait jamais trouvé de place en son cœur.
« Le Seigneur est avec toi » : l’Eglise a utilisé cette salutation de l’ange dans sa liturgie. C’est ainsi que le prêtre salue l’assemblée : « Dominus vobiscum » : « Le Seigneur est avec vous tous ». Etre chrétien, c’est compter sur la présence de Dieu « pour le meilleur et pour le pire », au milieu de la pagaïe des événements de sa vie. Malheureusement la traduction française est infidèle et inefficace : les traducteurs ont cru devoir employer un optatif, « Le Seigneur soit avec vous ». Ce qui était un constat magnifique : Dominus voibiscum, « le Seigneur avec vous », devient une sorte de vœu pieux, sans aucune portée concrète : le Seigneur soit avec vous. Il suffit de regarder Marie pour comprendre le contre-sens : le Seigneur est avec elle ! Voyez le visage qu’elle a sur les toiles magnifiques du Quattrocento italien, Filippo Lippi par exemple, voyez la lumière de ce visage, tellement humain, tellement féminin…

L’ange annonce à Marie qu’elle serait la Mère du Sauveur. Et dans un premier temps, Marie, qui n’est pas une gourde « à la botte », profère cette parole étonnante : « Comment en sera-t-il ainsi puisque je ne connais pas d’homme ». Elle est fiancée à Joseph, nous dit le texte, mais elle ne connaît pas d’homme. Le présent (duratif) de ce verbe signifie clairement : je ne veux pas en connaître – au sens biblique du terme. La seule explication de cette réponse, c’est que Marie a fait un vœu de virginité devant Dieu et qu’elle reproche à l’annonceur de ne pas l’avoir noté… N’en déplaise à Jacques Duquesne (voir son Marie chez Grasset), je ne vois pas d’autre explication de cet étrange dialogue. Où l’on voit que le christianisme n’est pas une religion de soumission mais de fierté. Il n’est pas interdit à l’homme (ou à la femme) d’avoir de la suite dans les idées ! L’ange la rassure en lui annonçant que Dieu respectera sa virginité : « L’Esprit saint viendra sur toi et la Puissance du Très Haut te couvrira de son ombre ». Une fois rassurée, Marie dit à l’ange : « Voici la servante du Seigneur ».
Martin Luther dit très bien que Marie est la première chrétienne. Elle est chrétienne avant le Christ. Son attitude personnelle est celle d’une servante de Dieu (elle emploie ce terme de « servante »), mais une servante fière de l’être et qui ne veut pas être menée en bateau…

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