L’autonomie a un prix. Après les lois Raffarin de 2004 relatives à la décentralisation, de nombreuses collectivités se sentent orphelines et surtout appauvries par l’État.
La loi de transfert des compétences n’avait pourtant qu’un seul objectif : redonner aux départements et aux villes un contrôle sur leurs dépenses, dans un “souci d’adaptation aux réalités locales pour plus de souplesse”.
Pourtant, à l’unisson du président de l’Assemblée des départements (ADF), Claudy Lebreton et du président du conseil général de Seine-Saint-Denis, Claude Bartolone, qui parle de “départements low cost”, les élus grondent.
Mardi, sept départements ont menacé de saisir le Conseil constitutionnel. En cause, l’autonomie financière des collectivités territoriales et les nouvelles responsabilités budgétaires auxquelles elles sont confrontées. Transport, aide sociale, éducation, culture sont autant de trous percés dans la cagnotte des collectivités.
Dans son rapport publié en mars 2010, l’ADF chiffre à plus de 3 milliards d’euros par an le déficit de compensation de l’Allocation de solidarité pour l’autonomie (APA), de la prestation de compensation au handicap (PCH) et du Revenu de solidarité active, (RSA, ancien RMI), tous trois transférés par l’État aux départements, au moment du transfert des compétences. Un cadeau empoisonné que le contribuable devra s’attendre à supporter, menace Claudy Lebreton.
En 2008, le versement de ces trois prestations aura coûté en tout aux départements 11,5 milliards d’euros, dont 5,98 milliards consacrés au RMI, 570 millions à la PCH et 4,85 milliards à l’APA. “Estimé [par l’État] à 2,5 milliards pour les années 2002-2003, le coût de l’APA s’est en réalité élevé à 1.855 milliards d’euros pour la seule année 2002, pour atteindre 3.205 milliards euros en 2003″. Depuis, “le coût de l’APA est en hausse constante”, affirme l’ADF. Pour de nombreux départements, “le financement du RMI reste largement déficitaire”.
Un boulet dans le portefeuille départemental qui, pour l’ADF, justifie le recours au Conseil constitutionnel. De fait, les départements rebelles prônent une féodalité moderne, avec un financement “paritaire”, où les subventions de l’État seraient couplées à celles des collectivités.
La Cour des comptes n’est guère plus optimiste et constate dans un rapport publié en octobre 2009 que “d’une manière générale, la décentralisation a eu pour effet de créer pour les départements des charges nouvelles, dont la dynamique et le poids sont considérables [et] peuvent avoir pour conséquence de réduire les marges de manoeuvre budgétaire”.
Les départements contestataires se disent, eux, déjà au bord de l’asphyxie.
(Dessin d’illustration de Miège, paru initialement sur le site du Cri du Contribuable.)
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