Fdesouche

Par le Père Augustin

Chers amis de François Desouche, depuis le 28 mars, pas un mot du Père Augustin. Silence radio de ma part. Je plaide coupable. C’est un scandale ! Croyez bien que je m’en veux d’être resté ainsi silencieux sans prévenir : surcharge de la semaine sainte (celle où vous attendiez le commentaire), voyage et panne d’Internet longue à détecter (par le supertechnicien superpro que je suis)… Enfin me voilà, plus décidé que jamais à affronter vos commentaires, parce que je suis heureux de vous donner cette lecture, qui par les temps qui courent, devient de moins en moins conventionnelle, il faut le dire.
– De moins en moins conventionnels les cathos, pas possible ?
– L’Eglise affronte le scandale et cela n’est pas fini. Le feu d’artifice des affaires en tout genre ne fait que commencer. L’hyper puissance libérale ou néo libérale jouit d’une position dominante qui devient absolue. Certains croient sans doute que l’hallali que l’on attend depuis deux siècles est proche. Mais l’Eglise a toujours transformé les persécutions dont elle était victime en victoires, par purification à l’intérieur et par témoignage à l’extérieur. Les chrétiens, par leur foi, sont vaccinés d’avance contre toutes les apocalypses.
Ni Fort Chabrol ni Camp des saints, la vérité chrétienne sur Dieu et sur l’homme l’emportera toujours sur tous les bobards de guerre ! C’est un peu le sujet de l’Evangile d’aujourd’hui.

Disons d’abord que nous sommes entrés dans le Temps de Pâques, qui dure jusqu’au Jeudi de l’Ascension, reproduisant les 40 jours que Jésus ressuscité a passé auprès de ses disciples, en leur apparaissant fréquemment et en « les entretenant du Royaume de Dieu ». Il s’agit d’essayer de comprendre ce que la Résurrection du Christ a changé dans la vie des hommes..
Juste pour (essayer de) me rattraper, j’ai trouvé sur le net ce texte d’un confrère qui m’est proche, je veux dire : aussi bien le texte que le confrère. Je me permets, avec son accord, de vous l’offrir en compensation de tout ce que je n’ai pas dit en cette période étymologiquement cruciale de la Semaine Sainte.
Le temps de Pâques

« Christ est vraiment ressuscité ». Nos amis orthodoxes utilisent cette formule comme une sorte de mot de passe en cette période de Pâques. Nous avons peut-être du mal les uns et les autres à nous rendre compte de ce qu’elle signifie concrètement…
La résurrection du Christ est le plus grand progrès jamais accompli dans l’histoire de l’humanité. A travers elle, notre existence personnelle prend de nouvelles dimensions, au-delà de l’espace-temps. Le Christ est le seul être humain qui ait jamais pu remporter personnellement la victoire sur la mort. Les plus grands capitaines ont remporté des victoires improbables, le jeune Bonaparte au Pont d’Arcole par exemple. Le Christ dans ce duel épique que chante le Victimae Paschali laudes, a remporté la victoire sur la mort : mors et vita duello mirando conflixerunt… Il n’y avait que deux combattants : le chef du camp de la Vie (dux vitae) et le chef du camp de la mort. Au moment où la Mort a cru pouvoir emporter son butin, c’est à ce moment que la victoire lui a échappé : par la mort, le Christ a détruit la mort, disons nous chaque jour dans la Préface pascale.
Jusqu’au Christ ressuscité, la mort avait toujours le dernier mot. L’auteur sacré du livre qu’on appelle en grec l’Ecclésiaste explique que “tout est vanité et poursuite du vent”. Au chapitre 3, il remarque “Le souffle de la bête et le souffle de l’homme sont le même souffle qui s’éteindra de la même façon”. Sans le Christ, il faut avoir le courage de le dire, tout n’est que mort et comme le dit un Kundera, même nos amours sont… risibles. Même les choses auxquelles nous attribuons la plus grande importance n’en ont aucune en réalité, confronté au terme universel des biens et des maux…
Vous me direz : n’y a-t-il pas moyen de prouver l’immortalité de l’âme en dehors du Christ ? Sans doute. Les plus grands philosophes s’y sont essayé. Platon a proposé un mythe de la transmigration des âmes. Pas très inspirant ! Aristote n’a rien proposé du tout, sinon peut-être dans l’Ethique à Eudème, avec un étonnant chapitre sur la fortune (nous dirions : la grâce actuelle). Les stoïciens exaltent le grand tout. Les falasifas ont théorisé ce retour au grand tout, en évoquant avec Averroès un intellect agent unique.
Le Christ seul (et sans aucune concurrence sur le marché des religions, c’est un fait) nous propose, à son exemple, la résurrection, “une résurrection de vie ou une résurrection de jugement” comme il dit au chapitre 5 de saint Jean. Le Christ seul nous propose d’être responsable de nos actes et de leur conférer une telle importance qu’ils puissent “nous suivre” dans l’éternité, comme dit l’Apocalypse : Heureux ceux qui sont morts dans le Seigneur car leurs actes les suivent”.

Bref on peut dire que la résurrection du Christ change tout à notre propre vie, en nous faisant entrevoir, par la puissance de Dieu et la qualité de nos actes, la possibilité de notre propre “résurrection de vie”. D’une certaine façon, si nous voulons vivre dignement, nous avons le choix entre le nihilisme (je parle du nihilisme noble, pas du nihilisme hébété du petit consommateur qui remplit docilement son cadi chez Auchan tous les samedis matins) et la résurrection du Christ. Et ce choix, comme le voyait très bien Louis Salleron naguère dans Ce qu’est le mystère à l’intelligence, ce choix est littéralement le choix entre les deux protagonistes du vieux cantiques Victimae paschali laudes dont je vous parlais tout à l’heure : la mort ou la vie.
Fasse Dieu que chacun, nous ayons la force de choisir la vie, c’est-à-dire la résurrection du Christ !

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