Croissance modérée en vue dans la zone euro, de nombreux risques demeurent. Selon une étude de l’assureur crédit Euler Hermes, et le dernier rapport de la BCE, l’horizon ne semble pas s’éclaircir pour les pays de l’OCDE.
L’heure est au bilan. Alors que chacun y va de son petit mot sur la fin de la crise, l’assureur crédit Euler Hermes dresse un premier tableau de la crise dans les pays de l’OCDE et les pays émergents. Les pays riches ont de quoi s’inquiéter.
Si l’assureur assure que la reprise de l’économie mondiale est présente, il n’oublie pas de préciser qu’elle n’est pas homogène selon les pays.
Au regard des chiffres de la production industrielle mondiale (+5,6%) et du commerce international (+7,4%) sur les six derniers mois, il ne fait pas de doute que le rebond de l’économie est bel et bien là. « Le quatrième trimestre 2009 a confirmé le rebond de la croissance des pays développés, leur PIB agrégé s’inscrivant en hausse de 0,8%, » commente Karine Berger, directrice marchés et marketing et chef économiste chez Euler Hermes.
Reste que cette reprise cache des disparités géographiques notables. A commencer par la zone Pacifique, « là où tout se passe, » selon Karine Berger. L’Asie a largement dépassé ses niveaux d’avant crise, avec des bonds de production de 15,9% et des échanges commerciaux en hausse de 1,9%. A l’inverse, dans les pays avancés, la production a chuté de 10,8% et le commerce de 13%. Au total, l’OCDE a perdu près de cinq points dans la production industrielle mondiale en dix ans. « Pour la première fois, les pays avancés fournissent moins de 50% de la production mondiale, » explique Karine Berger.
Une situation qui a eu des répercussions sociales, avec une perte de dix millions d’emplois et des répercussions financières, avec un quasi doublement du déficit public dans l’OCDE par rapport à 2008, à 1150 milliards d’euros.
Chine en tête, Europe à la traîne
Pour l’assureur crédit, la reprise mondiale va perdurer en 2010 et en 2011 avec une croissance de 2,9% chaque année. La Chine en tête devrait tirer le reste de l’Asie vers le haut. Euler Hermès parie sur une hausse du PIB asiatique de 7%.
Pour les pays de l’OCDE, la tendance pourrait être tout autre. « Les politiques monétaires devraient se durcir, les banques centrales étant déjà focalisées sur leur stratégie de sortie de crise. Et les gouvernements de faire disparaître leurs soutiens budgétaires. C’est déjà le cas en Espagne, et le schéma systématique à attendre est celui de la mise en place de politiques restrictives et même d’austérité dans certains pays. L’outil sera bien sûr une hausse des impôts, » argumente Karine Berger.
Ainsi, pour les États-Unis, l’assureur crédit craint un nouveau recul du PIB en 2011, sous l’effet justement de ces politiques. Quant à l’Europe, vue comme la grande perdante de la crise, elle devrait être à la traîne avec moins de 2% de croissance en 2010 et 2011 et certains pays encore en récession à l’instar de la Grèce, de l’Irlande ou de l’Espagne.
Comme quoi l’OCDE n’est plus seule au monde. « Les centres de gravité ont bougé et ce mouvement a été clairement accéléré par la crise, » a conclu le président du directoire de l’assureur-crédit Wilfried Verstraete.
L’économie de la zone euro va croître à un rythme modéré
, alors que la croissance reste soumise à de nombreux risques, estime la (BCE)
Cette année, “l’économie de la zone euro va progresser à un rythme modéré en 2010, dans un environnement incertain, ” écrit la Banque centrale européenne (BCE), dans son dernier rapport mensuel publié jeudi, confirmant une estimation antérieure.
Jusqu’à présent, les seize pays de l’euro ont essentiellement profité d’une reprise de la demande mondiale, tirée par les pays émergents, Chine en tête. Cette dernière a d’ailleurs fait état jeudi d’un bond de 12% de son Produit intérieur brut (PIB) au premier trimestre.
L’institution prévoit une hausse de 0,8% du PIB en zone euro cette année, selon ses dernières prévisions annoncées début mars.
Mais les risques susceptibles de contrarier ce pronostic demeurent, a prévenu l’institution, citant entre autres une nouvelle flambée potentielle des prix des matières premières ou une “correction désordonnée” des grands déséquilibres mondiaux.
La BCE note à cet égard que ces derniers se sont quelque peu atténués avec la crise économique. Le déficit des comptes courants américains a ainsi diminué, de même que l’excédent commercial chinois.
“Mais ce resserrement va probablement rester transitoire étant donné qu’il a été provoqué par des facteurs cycliques qui vont probablement s’inverser à partir de 2010,” selon elle.
A ses yeux, les déséquilibres continuent de “poser un risque clé pour la stabilité macro-économique et financière mondiale,” et il revient à chaque pays de contribuer à les faire disparaître, dans le cadre d’une action globale devant être pilotée au niveau du G20, qui rassemble les États industrialisés et les grands pays émergents.
Le chef économiste de la BCE Jürgen Stark s’en est lui aussi inquiété. “Il ne fait aucun doute que la crise nous laissera en héritage de sévères déséquilibres macro-économiques,” a-t-il souligné dans un discours prononcé à Washington et dont le texte a été communiqué par la BCE.
L’Allemand a notamment évoqué la situation en Europe, où plusieurs pays, Grèce en tête, n’ont pas profité des périodes de croissance pour consolider leurs finances publiques et croulent sous un endettement massif.
“Hors zone euro, il semble encore plus difficile pour la Grande-Bretagne, les États-Unis et le Japon de ramener les ratios de dette publique dans des limites plus sûres,” a-t-il jugé.
Pour lui, s’occuper de ces déséquilibres “va représenter l’un des défis les plus intimidants pour les responsables politiques de l’histoire moderne.”
L’Usine Nouvelle & Le Point