Alors que la banque prépare son argumentaire pour une audition mardi, le Sénat publie des courriels embarrassants qui montrent comment elle a profité de la crise des crédits immobiliers à risques pour empocher des dizaines de millions de dollars. En outre, cinq dirigeants auraient revendu leurs actions après l’annonce d’une enquête de la SEC.
Une commission du Sénat américain a publié ce samedi 24 avril des courriels montrant comment la banque Goldman Sachs a bénéficié de la crise des crédits immobiliers à risques pour empocher des dizaines de millions de dollars. Les messages montrent ses dirigeants se gargarisant de profits réalisés grâce à la crise en 2007.
Carl Levin, président de la Sous-Commission sénatoriale permanente d’enquête, a écrit dans un communiqué accompagnant la publication de ces documents que ” Les banques d’investissement comme Goldman Sachs n’étaient pas de simples courtiers, elles étaient les promoteurs intéressés de produits financiers risqués et complexes qui ont favorisé l’éclosion de la crise. “
Dans un de ces messages, le PDG de Goldman Sachs, Lloyd Blankfein, affirme: “Nous n’avons bien évidemment pas échappé à la pétaudière des crédits immobiliers à risque. Nous avons perdu de l’argent et ensuite nous en avons gagné plus que nous n’en avons perdu grâce à nos positions courtes.”
Les positions courtes sont des opérations boursières permettant à celui qui les passe de réaliser des gains en cas de baisse des titres sur lesquelles elles portent. Elles peuvent être prises dans un but purement spéculatif comme dans un souci de se protéger (lorsque l’investisseur détient lui même des titres sur lesquels portent ces positions).
Par ailleurs, après l’annonce d’une plainte des actionnaires contre les dirigeants, le Wall Street journal révèle que cinq d’entre eux ont cédés leurs actions après que la banque eut été informée qu’une enquête de la SEC, le gendarme boursier américain, visait l’établissement. Ils auraient revendus leurs actions à un prix de vente de 65,4 millions de dollars (48,9 millions d’euros).
Selon le Wall Street Journal, les responsables ayant vendu les actions en question sont un des avocats-conseil, deux vice-présidents, un des responsables de la comptabilité et un membre du conseil d’administration.
Les ventes auraient eu lieu entre octobre 2009 et février 2010, écrit le Wall Street Journal sur son site internet, citant l’entreprise InsiderScore.com, qui se présente comme un observatoire des transactions boursières d’initiés. Quelque mois auparavant, en juillet 2009, la SEC avait fait savoir à la banque qu’elle envisageait de la poursuivre en justice.
Le 16 avril dernier, jour où la SEC annonçait avoir déposé plainte pour fraude contre Goldman Sachs devant la justice civile, le titre Goldman Sachs perdait environ 13% de sa valeur à la Bourse de New York. Une chute qui avait continué tout au long de la semaine.
Ces révélations tombent à un mauvais moment pour la banque, qui cherche à défendre son image alors qu’elle est visée par une plainte en justice pour fraude. Cette plainte a été déposée par l’autorité de régulation des marchés boursiers américaine (SEC) le 16 avril pour fraude devant la justice civile. La banque est accusée par la SEC d’avoir trompé des investisseurs en leur faisant faire des placements sur des titres risqués dont elle savait qu’ils allait baisser, sans les informer quelle-même pariait sur la baisse des produits qu’elle leur faisait acheter. Selon le Washington Post de samedi 24 avril, la banque s’apprête à nier la semaine prochaine devant le Congrès avoir mal agi dans cette affaire.
Daté du 18 novembre 2007, le message de M. Blankfein est une réponse à un responsable de la banque l’avertissant de la publication d’un article dans le New York Times tendant à montrer que Goldman Sachs a échappé à la crise des crédits immobiliers à risque ayant éclaté quelques mois plus tôt.
M. Blankfein ajoute néanmoins: la crise “n’est pas terminée, donc qui peut dire comment cela se finira?“
Un autre des quatre courriels publiés par la sous-commission est daté du 25 juillet 2007 et écrit par David Viniar, le directeur financier de la banque. M. Viniar répond à un cadre de la maison montrant comment Goldman a empoché environ 50 millions de dollars en pariant sur la baisse de titres liés à des créances immobilières.
“Ça dit bien ce qui pourrait arriver à ceux qui ne sont pas blindés en positions courtes,” écrit-il.
Un des courriels est daté de mai 2007, avant l’explosion de la bulle immobilière, et montre, selon M. Levin, que Goldman a gagné 2,5 millions de dollars grâce aux protections qu’elle avait prises contre la baisse de titres qu’elle vendait à ses clients.
Aucun porte-parole de Goldman Sachs n’avait pu être joint en milieu de journée pour réagir à la publication de ces documents .
La SEC accuse la banque d’avoir trompé des investisseurs en leur faisant faire des placements sur des titres risqués dont elle savait qu’ils allait baisser, sans les informer qu’elle-même pariait sur la baisse des produits qu’elle leur faisait acheter.
MM. Viniar et Blankfein doivent témoigner mardi devant la sous-commission présidée par M. Levin, avec Fabrice Tourre, employé français de Goldman Sachs au centre de la plainte de la SEC.
Selon le Washington Post de samedi, les dirigeants de la banque doivent déclarer à cette occasion que la banque d’affaires n’a pas cherché à tromper ses clients, ne sachant pas comment allait évoluer le marché des prêts immobiliers à risque.