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Jusqu’où les taux grecs peuvent-ils monter ? Et pendant combien de temps l’euro va-t-il baisser ? Les marchés sont engagés dans une course que rien ne semble pouvoir arrêter. Vendredi 7 mai, le rendement des obligations grecques a de nouveau crevé le plafond : plus de 12 % pour les emprunts d’Etat à dix ans et 18 % pour les emprunts à deux ans.

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L’euro, a repris, lui, son voyage vers les profondeurs : toute la semaine, il a enchaîné les records à la baisse, passant sous le seuil de 1,26 dollar jeudi 6 mai, son point le plus bas depuis 14 mois. Un désaveu pour les dirigeants de la zone euro qui se réunissaient vendredi pour finaliser le plan d’aide à Athènes.

Ce plan, plus personne n’y croit vraiment. Fonds insuffisants, risque d’explosion sociale, menace de contagion au Portugal et à l’Espagne : la crise semble sur le point de dégénérer. Certains grands économistes commencent même à sonner le tocsin de la monnaie unique.

“L’euro en soi est-il en danger ? En un mot, oui”, écrit sur son blog le Prix Nobel d’économie, Paul Krugman, qui n’exclut plus des défauts en série. Un jugement partagé peu ou prou par le très europhile Joseph Stiglitz, autre Prix Nobel : si l’Europe “ne règle pas ses problèmes institutionnels fondamentaux, l’avenir de l’euro sera peut-être très bref”, s’inquiète-t-il.

Qu’en dit, le gardien de la monnaie unique ? Le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, s’est contenté de messages sybillins, jeudi 6 mai, à l’issue du conseil des gouverneurs. Impuissant à enrayer la chute des marchés.

La semaine n’a pas été facile pour le patron de la BCE, qui a adopté, lundi, une mesure d’urgence inédite : l’annulation pure et simple du seuil d’éligibilité des titres grecs acceptés en échange de crédits. Pour soulager les banques, la BCE est prête à accueillir en dépôt des obligations grecques quand bien même celles-ci seraient cataloguées “pourries”.

M. Trichet avait pourtant assuré trois mois plus tôt qu’il ne prendrait jamais du mauvais papier en pension pour le bénéfice d’un seul pays. A-t-il voulu faire montre de souplesse et de pragmatisme ? Les Allemands, eux, n’ont pas du tout aimé. “Le président de la BCE a sacrifié sa crédibilité et celle de toute la banque centrale. Cette institution censée garantir la stabilité de la monnaie”, accusait, dans un éditorial au vitriol, le quotidien Die Welt, mercredi.

Outre-Rhin, les défenseurs de l’orthodoxie sont près d’y voir la cause principale de la glissade de l’euro. Les critiques ont sans doute porté, M. Trichet n’ira pas plus loin. Au moins dans un premier temps. Jeudi, il a refusé tout net d’évoquer l’option d’une intervention de la BCE sur le marché pour racheter des emprunts d’Etats.

Une méthode dite du “quantitative easing“, consistant à faire tourner la planche à billets pour financer les déficits. C’est ce que les dirigeants de 47 grandes banques européennes l’ont suppliée vendredi de faire : être un “acheteur de dernier recours”, selon le Financial Times du samedi 8 mai.

Cette politique contredit le mandat historique de la BCE : celui de la stabilité des prix. Mais la banque centrale pourra-t-elle éviter éternellement de recourir à cette arme “nucléaire” ? Pour certains analystes, cet instrument, utilisé pendant la crise par la Réserve fédérale américaine (FED) et la Banque d’Angleterre, serait seul à même de stopper l’engrenage infernal.

Tous ne pensent pas ainsi. “Si la BCE devait décider, un jour, de monétiser la dette publique”, estime Bruno Cavalier, chez Oddo Securities, “on pourra ipso facto signer l’acte de décès de l’Union monétaire.”

Le Monde
(Merci à SPOILER)

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