La Banque centrale européenne (BCE) menace de se transformer en «mauvaise banque» («bad bank») en poursuivant ses achats d’obligations de pays de la zone euro à la situation budgétaire critique, estime Thomas Mayer, l’économiste en chef de la Deutsche Bank, dans un entretien publié mardi dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung.
Sur fond de crise de la zone euro, la BCE s’est engagée la semaine dernière à acheter sur le marché des obligations des pays les plus endettés, et qui se refinancent difficilement sur les marchés. Pour neutraliser l’effet potentiellement inflationniste de cette mesure, la banque va éponger des liquidités sur le marché.
«Le marché craint que la BCE ne soit utilisée comme bassin de décantation et que son bilan ne se détériore, selon M. Mayer, car certains des États dont la BCE achète actuellement des obligations peuvent faire faillite, malgré le soutien qu’on leur apporte.»
L’expression “bad bank” désigne les structures de défaisance créées par les banques pour y transférer leurs actifs toxiques ou non stratégiques.
Pour M. Mayer, la BCE, qui a lancé une offensive médiatique dans la presse allemande pour défendre son action, n’en a pas moins clairement perdu en crédibilité en prenant l’engagement d’intervenir directement. Mais “on peut limiter les dégâts,” en faisant de ce soutien une mesure “exceptionnelle, temporaire et au volume limité,” selon lui.
Il y a quelques jours, le patron de la Deutsche bank, première banque allemande, le Suisse Josef Ackermann, avait fait parler de lui en mettant en doute, lors d’une intervention télévisée, la capacité de la Grèce à redresser ses finances publiques, s’attirant les commentaires acerbes du gouvernement allemand. Pour M. Mayer, “les doutes sont légitimes” sur l’efficacité des mesures d’économies décidées par un certain nombre de pays européens, en premier lieu la Grèce.