Retraites, régimes d’indemnisation du chômage, allocations diverses… Les systèmes de protection sociale mis en place en Europe après la Seconde Guerre mondiale sont aujourd’hui confrontés à une menace majeure avec la crise de la dette, qui pousse les États à réduire leurs dépenses.
En Allemagne, le gouvernement, qui doit réduire le budget national d’au moins 3 milliards d’euros, laisse entendre qu’il pourrait diminuer l’indemnisation du chômage. “Nous devons adapter nos systèmes de sécurité sociale de manière à motiver les personnes qui acceptent du travail, et ne pas donner d’incitations contre-productives,” a expliqué samedi le ministre des Finances Wolfgang Schäuble à l’hebdomadaire dominical “Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung.“
Désormais, l’heure est à la lutte contre les déficits dans l’UE pour tenter d’éviter une nouvelle dégradation de la confiance dans l’euro. “Nous devons changer, nous adapter (…) pour la protection de notre modèle social,” plaide Joaquin Almunia, commissaire européen en charge de la Concurrence. L’austérité budgétaire comporte toutefois un risque majeur, notent les experts: celui d’étouffer une croissance fragile.
La Grande-Bretagne a dévoilé lundi un plan d’économies de 6 milliards de livres sterling (6,9 milliards d’euros) au détriment principalement des dépenses publiques et des salaires des fonctionnaires. Le nouveau gouvernement britannique veut relever l’âge de la retraite de 60 à 65 ans pour les femmes et de 65 à 66 ans pour les hommes.
Il compte aussi obliger les demandeurs d’emploi à chercher du travail pour percevoir des allocations chômage, limiter les crédits d’impôts pour les enfants à charge et abandonner une prime de 250 livres (290 euros) versées aux familles pour chaque naissance.
En France, le ministre du Travail Eric Woerth a confirmé lundi que le gouvernement entendait répondre au problème du financement des retraites “en augmentant la durée passée au travail.” De son côté, le ministre de l’Industrie Christian Estrosi a précisé que le gouvernement s’orientait “vers une augmentation de l’âge de la retraite.“
En Espagne, des mesures d’économie sur les salaires des fonctionnaires commenceront à s’appliquer à partir de juin, et le gouvernement a gelé une revalorisation des pensions destinée à compenser la hausse des prix sur au moins deux ans.
Madrid a également décidé de réduire de 300 millions d’euros les aides aux personnes handicapées et a supprimé une prime de 2.500 euros pour la naissance de chaque enfant. Il propose aussi de relever l’âge de la retraite pour les hommes de 65 à 67 ans.
Les pays d’Europe du Nord ont déjà mis en oeuvre des réformes et possèdent des systèmes d’assurance-chômage qui se concentrent sur le retour à l’emploi, note Gayle Allard, professeur d’environnement économique de l’Institut de l’entreprise à Madrid. Le Danemark et d’autres pays nordiques sont connus pour avoir les impôts les plus élevés du monde et les systèmes de protection sociale les plus généreux.
Le taux de chômage s’élevait à 7,5% au Danemark au premier trimestre, soit bien en dessous de la moyenne de l’UE (9,6%). Il a atteint 8,9% en Suède et en Finlande, et seulement 3% en avril en Norvège, meilleur élève du Vieux Continent, même s’il n’est pas membre de l’UE.
Les pays du sud de l’Europe qui n’ont pas mené de telles réformes paient un prix élevé. Les Grecs devront désormais cotiser 40 années au lieu de 37 pour leur retraite, et l’âge de la retraite anticipée est fixé à 60 ans au plus tôt. Les fonctionnaires grecs gagnant plus de 3.000 euros seront privés de leurs 13e et 14e mois de salaire. La Grèce a dû accepter des mesures d’austérité sévères en contrepartie d’une aide UE-FMI.
Au Portugal, le gouvernement privilégie les hausses d’impôts. L’indemnisation chômage sera revue à la baisse et les chômeurs devront accepter tout emploi payé dont le salaire est d’un montant supérieur de plus de 10% à leur allocation. Lisbonne renforce également les contrôles sur les demandes de prestations sociales, gèle les salaires dans la fonction publique et réduit les investissements publics.
En Italie, le gouvernement veut réduire les dépenses publiques de 24 milliards d’euros en 2011-2012. “Je m’inquiète, parce que depuis qu’on a l’euro ma pension a été divisée par deux et maintenant j’ai peur d’être pénalisée aussi par cette crise,” confie Giannina Di Matteo, une retraitée de 68 ans vivant à Rome.