Les entreprises cherchent à préserver au maximum leurs dividendes. Les analystes anticipent une hausse de 15 % des dividendes en masse, qui seront versés l’an prochain, après une légère contraction cette année.
Même si les turbulences des marchés ne semblent plus finir, les analystes restent optimistes sur les entreprises. Ils prévoient de belles croissances des bénéfices et des dividendes.
Le consensus anticipe une très légère baisse des dividendes versés cette année (au titre de l’exercice 2009) des entreprises européennes du Stoxx 600 (- 4,4 %, à 233 milliards d’euros), malgré un recul plus prononcé des profits (- 21,4 %), d’après les données de FactSet retraitées par PrimeView.
Surtout, ils tablent sur de nettes hausses pour le futur : les dividendes versés l’an prochain (sur l’exercice 2010) devraient augmenter de 15,3 %, puis de 11,9 % en 2012. En 2012, les dividendes auront ainsi presque retrouvé leur sommet de 2007.
Le constat est similaire pour la France, où la saison des assemblées générales et des versements bat son plein. D’après les calculs réalisés en début d’année par Ricol Lasteyrie, sur la base des publications de résultats annuels, les entreprises du CAC 40 devraient verser autour de 35,5 milliards d’euros à leurs actionnaires, un montant globalement stable par rapport à l’année précédente. Les analystes anticipent ensuite des hausses respectives de 9 % et 12 % pour les exercices 2010 et 2011.
Ces chiffres reflètent la volonté des sociétés de préserver leurs actionnaires, en phase de crise, et d’augmenter leurs coupons dès la reprise.
Sur longue période, la volatilité des dividendes est inférieure à celle des résultats. Exemple emblématique : BP, pourtant soumis à la pression de politiques pour réduire ses dividendes, a indiqué hier qu’il paierait le dividende intérimaire prévu en juin. « Le versement continue de jouer un rôle de signal lancé au marché », rappelle Dionisio Luiz, analyste chez Markit Dividend.
Ainsi, le taux de distribution (calculé par rapport aux résultats) des entreprises de l’Euro Stoxx 50 atteint cette année 53 %, au plus haut depuis cinq ans au moins, contre une moyenne de 42 %, selon les calculs de Markit. En France, il devrait frôler les 60 %, là aussi, un record.
« Les entreprises se sont désendettées et ont reconstitué leur trésorerie. Toutefois, elles restent réticentes à investir, préférant redistribuer le cash à leurs actionnaires », explique Pierre Sabatier, stratège chez PrimeView.
Parallèlement, la forte baisse des marchés a entraîné des rendements (calculés par rapport aux cours boursiers) élevés, de plus de 4 % en France et de 3,5 % en Europe, au-dessus des moyennes historiques (selon les données de PrimeView et d’ING IM). Ils sont supérieurs à 5 % dans plusieurs secteurs défensifs comme les télécoms et les services aux collectivités.
Grande aversion au risque
Le rendement moyen est proche de celui des obligations d’entreprises (selon la maturité et la notation) et dépasse celui des emprunts d’Etat des grands pays européens, « ce qui est rare dans l’histoire », reprend Pierre Sabatier. « Cela témoigne des fortes turbulences et surtout de la grande aversion au risque : en dépit des rendements élevés, les investisseurs sont très prudents sur les actions. »
Pour lui, comme pour nombre d’observateurs, « les investisseurs ne croient pas aux anticipations des analystes pour 2011 (+ 12 % sur les profits en masse, NDLR). Des révisions baissières pourraient remettre en cause les anticipations de dividendes. »
Du coup, le marché des swaps sur les dividendes table actuellement sur une baisse de 12 % des dividendes en Europe l’an prochain et de 8 % en France, selon les données de la Société Générale. « Toutefois, ce sont des marchés très dépendants des flux », tempère Andrew Lapthorne, stratégiste à la SG.
« Les marchés dérivés sont utilisés par nombre de fonds alternatifs pour des arbitrages et ne sont pas très liquides. Durant le krach éclair de Wall Street début mai, on a vu une plongée sur les dérivés sur les dividendes sans qu’il y ait un changement des fondamentaux », appuie Manu Vandenbulck, gérant chez ING IM.