Marc Faber, homme d’affaires suisse mondialement connu des milieux économiques pour avoir anticipé à peu près toutes les crises depuis 1987 et dont le site, humoristiquement baptisé gloomboomdoom.com (littéralement : morosité-prospérité-sinistrose.com !), annonce, depuis quelques temps, une catastrophe, répondait aux questions de Bloomberg TV, le 22 septembre 2009.
Morceaux choisis.
Bloomberg TV : Si vous étiez le gouverneur de la Fed, vous préoccuperiez-vous uniquement de l’inflation pour déterminer votre politique monétaire et vous désintéresseriez-vous complètement de la croissance du crédit, sans jamais la mentionner dans vos discours et publications, même si cette croissance du crédit et de l’effet de levier est supérieure à la croissance économique ?
Marc Faber : La raison pour laquelle ils ne s’en sont pas préoccupés c’est qu’à l’exception de quelques rares économistes, comme John Taylor, [ce n’est jamais mentionné]
Si vous lisez l’article récemment publié par Krugman – 6000 mots – où il accuse les autres économistes : « comment ont-ils pu se tromper autant ? » (il aurait du titrer « comment ai-je pu me tromper autant »…) en fait, dans tout l’article il ne mentionne jamais la croissance excessive du crédit, ou l’augmentation excessive de l’effet de levier. Pas une seule fois.
Les économistes américains, à la Fed, au Trésor, y compris M. Greenspan, et dans l’université, négligent complètement cette croissance excessive du crédit, à l’exception de gens comme Robert Schiller, John Taylor…
Bloomberg TV : que faudrait-il faire aujourd’hui ? (…)
Marc Faber : Je veux faire les observations suivantes : (…) si vous avez un problème dû à une croissance excessive du crédit, d’un niveau excessif de l’endettement dans le système, vous ne pouvez pas résoudre ce problème en empilant encore plus de dettes, c’est-à-dire en monétisant la dette ou en créant de nouveaux déficits budgétaires. Vous retardez le problème. Le problème que j’ai avec cette reprise [économique] … si on monétise, le cours des actions peut encore monter jusqu’à des sommets, comme au Zimbabwe ou dans la République de Weimar, mais on ne fait que retarder le problème, jusqu’à ce que la crise ultime survienne. Et cela arrivera un jour.
Bloomberg TV : (…) que sera la prochaine crise, et quand devrons nous nous préoccuper des niveaux extrêmes [d’endettement des USA] (…) ?
Marc Faber : C’est la difficulté. Nous avons une dette supérieure à 375% du PIB…. nous pouvons aller à 400%, 500%… si on monétise.
Les profits des entreprises ne peuvent croître indéfiniment plus rapidement que le PIB, pas plus qu’on ne peut avoir indéfiniment une croissance du crédit plus rapide que celle du PIB nominal.
L’heure de vérité arrivera un jour. Je ne sais pas si c’est demain ou dans 3, 5 ou 10 ans, mais la prochaine crise abattra le système capitaliste dans son ensemble.
Bloomberg TV : vous en êtes sûr ?
Marc Faber : Oui, [elle abattra] Bloomberg, moi-même et tout le monde… (…)
On ne peut pas réduire le déficit budgétaire car cela provoquerait une contraction de l’activité économique.
Avec la réduction du déficit de la balance des paiements, la monétisation devra se poursuivre aux USA, car il y aura moins d’achats des bons du Trésor par l’étranger.
Les achats par l’étranger ont ralenti, sinon le dollar monterait et ne baisserait pas. La faiblesse du dollar est un symptôme de l’inflation [existant] dans le système. (…)
Lorsqu’il y a de l’inflation, définie en terme de croissance de l’offre de monnaie et de croissance du crédit, les monnaies s’affaiblissent.
Les autres pays font la même chose. Les USA ne sont pas les seuls [dans cette situation]. Les banquiers centraux sont tous dans le même bateau. Ils n’ont qu’une seule recette qui est d’imprimer de l’argent. (…)