En ce début d’été stambouliote, la soirée s’annonçait parfaite, raffinée et conviviale. Quelques Turcs mais plus encore de Français: ministre et anciens ministres (Pierre Lellouche, Jean-Pierre Jouyet, Catherine Lalumière, Christian Pierret), députés ou sénateurs, du PS ou de l’UMP, hommes d’affaires et intellectuels. (…)
Affable et tout sourire, le Président de la république de Turquie prend alors la parole: «L’orientation stratégique fondamentale de la Turquie est et reste l’Union européenne (.. .) mais il faut être réaliste, et reconnaître que dans les relations entre la France et la Turquie, il y a un problème. (…) Le processus d’adhésion à l’Union européenne forme une partie inséparable des relations bilatérales».
Quelques Français sont sous le choc: «Quelle arrogance, quelle agressivité, s’étonne le lendemain matin un député UMP. Maintenant que la Turquie a réinstauré son influence dans la région, elle vient nous donner des leçons!» (…)
«Tout cela m’agace! Désormais, le discours français officiel consiste à dire que ça va mieux, que les relations avec la Turquie sont moins crispées, qu’elles se sont “normalisées”, analyse Didier Billion chercheur à l’IRIS. Si on s’en tient à la forme, d’accord mais sur le fond, c’est du pipeau! On n’avance pas du tout! Je ne crois pas qu’il y ait une évolution de la position de fond». (…)
Dorothée Schmidt, chercheuse à l’Ifri, affirme que «sur le dossier turc, les élites françaises se soient “rocardisées”. Elles reprennent désormais les arguments économiques, stratégiques et culturels développées par l’ancien Premier ministre Michel Rocard dans son livre “Oui à la Turquie”. Et paradoxalement, c’est ce dernier qui semble aujourd’hui le plus pessimiste!». Slate