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Billet humoristique savoureux du chroniqueur québécois Pierre Foglia

Jacob Tierney, cela vous dit quelque chose? C’est ce jeune réalisateur juif montréalais qui, il y a un mois ou deux, a lancé un pavé dans la mare fétide et croupissante de notre cinématographie en déclarant que le cinéma québécois de souche (ouache) ne reflète pas la réalité québécoise parce qu’il ne fait aucune place aux immigrés.

Il a mille fois raison. Je ne comprends pas que notre industrie cinématographique, à l’exemple de la fonction publique, ne se soit pas donné des règles pour corriger cela, règles qu’on pourrait appeler «de représentation positive». Pour être financé, tout film québécois devrait obligatoirement compter dans sa distribution un juif, cinq Haïtiens, deux Pakistanais, deux Indiens des Indes, un Bulgare, trois Libanais, un Iranien, un Russe et un Indien de chez nous, tous en costume national.

Je reviens au jeune Édoin. Quand j’ai vu débarquer sa gang de cinéma dans ma campagne, je n’ai rien dit, mais aussitôt l’immigré en moi s’est senti une fois de plus rejeté. Des actrices et acteurs connus, des producteurs de renom, des techniciens chevronnés, mais des immigrés? Pas un seul. Même pas un Luxembourgeois. Rien.

Je le dis en toute modestie: je pourrais épargner à ce film une autre critique justifiée de nos amis anglos en lui donnant, par ma seule figuration, la dimension multiculturelle indispensable qu’il n’a pas pour l’instant. D’ailleurs, il me vient qu’au lieu de tout simplement dire à mon passage?: tiens, un cycliste, la dame qui tient le rôle principal pourrait être plus précise: tiens, un cycliste franco-italo-canadien.

Mais c’est peut-être trop. Je vous dis cela parce la semaine où Jacob Tierney a dénoncé la consanguinité de notre cinématographie, j’ai loué à mon club vidéo un film indo-canadien tourné par un Indien qui vit à Toronto, intitulé Cooking with Stella. Ça raconte l’histoire d’un chef (de cuisine) canadien qui déménage à New Delhi pour y suivre sa femme, qui vient d’y être nommée haut-commissaire.

Une merde, mais une merde! Qui a bien évidemment enchanté le Canada anglais, où faire des films de merde n’est pas si grave pour autant qu’ils soient multiculturels.

Je reviendrai sur le sujet prochainement – je vous parlerai d’un de mes amis qui vient de finir sa thèse de doctorat sur l’absence totale de ratons laveurs dans le théâtre grec, particulièrement dans les tragédies d’Eschyle, de Sophocle et d’Euripide.

Rien n’est jamais parfait, finalement.

Cyberpresse

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