Jusqu’où l’euro peut-il baisser ? Très loin, selon les paris que seraient en train de fomenter certains fonds spéculatifs anglo-saxons. Alors que la monnaie unique, fragilisée par la crise grecque, est passée de 1,51 dollar en décembre 2009, à moins 1,35 dollar en février, le Wall Street Journal indique, vendredi 26 février, que les plus grands et plus célèbres hedge funds se seraient réunis, en début de mois lors d’un dîner-débat à Manhattan, pour évoquer leur challenge : faire glisser l’euro jusqu’à un niveau de parité avec le dollar.
Pour ces acteurs anglo-saxons, l’euro a toutes les raisons de plonger. Les difficultés budgétaires de la Grèce, aujourd’hui menacée de défaut, s’apparentent à celle des banques américaines Bear Stearns, rachetée pour une bouchée de pain par JPMorgan en 2008, ou encore de Lehman Brothers, tombée à l’automne 2008.
Parmi eux figure le fonds de l’américano-hongrois George Soros, surnommé “l’homme qui a fait sauter la banque d’Angleterre” après avoir, en 1992, spéculé à la baisse sur la livre sterling, provoquant l’exclusion de la monnaie britannique du Système monétaire européen (SME). A ses côtés, David Einhorn, président du fonds Greenlight Capital. Ce quadragénaire au visage d’ange s’était fait remarquer en France en 2008 en tant qu’actionnaire remuant de la banque en difficultés Natixis.
Jouant les Cassandre, M. Soros alerte, dans une tribune au Financial Times, le 22 février, que la zone euro “fera face à des défis plus grands que la Grèce“, soulignant les failles intrinsèques de l’union monétaire européenne. “La survie de la Grèce ne réglera pas la question de l’avenir de l’euro.”
Pour eux, “il y a beaucoup d’argent à se faire“, rapporte le Wall Street Journal. Ces spéculateurs emprunteraient jusqu’à 20 fois la mise nécessaire, afin de faire jouer un “effet de levier”. Une technique qui permet d’amplifier les gains comme les pertes. Si le pari est gagnant, 5 millions de dollars misés rapportent… 100 millions.
“Il y a un vrai danger”
Les spéculateurs peuvent-ils l’emporter ? “Il y a un vrai danger. Ce qui s’est passé sur les banques américaines est en train de se passer sur l’euro“, avertit l’économiste Jacques Attali. Selon lui, ces attaques répétées démontrent l’impérieuse nécessité pour l’Europe de se doter d’une gouvernance économique. Sans cela, dit-il, “la zone euro peut exploser“.
Une poignée de hedge funds pourrait toutefois ne pas suffire à faire vaciller la monnaie unique, tant les volumes traités sur le marché des changes sont élevés. “Sans doute peuvent-ils réussir à amplifier un tout petit peu le mouvement“, mais pas au delà, juge Christian Parisot, économiste chez Aurel, qui estime qu’un dollar à parité face à l’euro “n’a pas de sens économique“. En outre, souligne Antoine Brunet, économiste chez AB Marchés “les autorités américaines ne laisseront pas faire. Un euro trop faible pénaliserait leur économie. Les hedge funds jouent contre leur pays“.
(Merci à sainte Rita)