Tombé sous les balles allemandes le 29 août 1941 au mont Valérien, le comte Honoré d’Estienne d’Orves, officier de marine, est l’un des premiers martyrs de la Résistance. De l’Afrique du Nord à la Bretagne via Londres, il servit la France Libre : “En continuant la lutte, j’ai pensé que j’agissais conformément à nos traditions”.
Né en 1901 à Verrières-le-Buisson, Henri Louis Honoré d’Estienne d’Orves est issu d’une longue lignée nobiliaire et grandit, à l’instar de Philippe de Hauteclocque (le futur général Leclerc), dans une famille légitimiste. Élève à Louis le Grand, il est reçu à Polytechnique en 1921 puis choisit de servir dans la Marine. Affecté à Brest, il rejoint les Equipes sociales, s’engageant ainsi dans l’action culturelle et sociale catholique auprès du monde ouvrier.
En 1939, il est lieutenant de vaisseau et officier d’ordonnance à bord du croiseur lourd Duquesne, dans la Force X. Lorsque l’armistice survient, un accord tacite entre les amiraux français et anglais évite l’affrontement mais d’Estienne d’Orves et son escadre se trouvent bloqués à Alexandrie. C’est le moment qu’il choisit pour regrouper une quarantaine de “Français libres” (les premiers) et continuer la lutte. Il débarque en septembre 1940 en Ecosse puis rejoint Londres, où il rencontre l’amiral Muselier, commandant des Forces Navales françaises-libres, puis par le général De Gaulle.
Honoré d’Estienne d’Orves est affecté au bureau des renseignements. Le 10 octobre, devenu capitaine de corvette, il remplace comme chef du 2e bureau de la France Libre le colonel Passy et décide de se rendre sur le terrain. Le 21 décembre 1940, le chalutier “la Marie-Louise” part de Newlyn, en Cornouailles, avec à son bord d’Estienne d’Orves – devenu “Jean-Pierre” – et un jeune radio alsacien, Alfred Geissler, dit “Marty”. Débarqués non loin de la pointe du Raz, ils gagnent Chantenay, près de Nantes, d’où ils établissent le contact avec des membres du réseau secret de renseignement “Nemrod”.
Le 25 décembre, la première liaison radio entre la France occupée et Londres est établie. Deux jours plus tard, d’Estienne d’Orves est à Paris, où il rencontre des pionniers de la Résistance. Suite à la trahison de “Marty”, qui contacte le contre-espionnage allemand, il est arrêté, transféré à Berlin puis incarcéré à Paris, le 26 février, dans la prison du Cherche-Midi. Par la prière, l’écriture et la lecture, il s’efforce de garder espoir et d’entretenir le moral de ses camarades. Son procès devant la Cour martiale allemande de Paris s’ouvre le 13 mai 1941.
Le 26, il est condamné à mort avec sept autres membres du réseau Nemrod. La grâce des condamnés, demandée par l’amiral Darlan, sera rejetée. Dans ses dernières lettres, d’Estienne d’Orves confie espérer “la paix dans la grandeur retrouvée de la France“. Le 29, il est exécuté au mont Valérien en compagnie de ses camarades Maurice Barlier et Jan Doorni.