Le Président Basescu a annoncé que la Roumanie signerait en 2011 un nouvel accord d’emprunt avec le FMI, sans en préciser le montant. L’objectif est de ramener le déficit à 4,4% du PIB. Pour cela, Traian Basescu s’est engagé à lutter contre les gaspillages et à privatiser les entreprises publiques, mais son discours n’a convaincu ni les milieux d’affaires ni les observateurs étrangers, qui craignent une fragilisation encore plus grande de l’économie roumaine.
« En 2011, nous devrons emprunter 5,7 milliards d’euros rien que pour couvrir le déficit budgétaire. En 2011, nous signerons un nouvel accord avec le FMI », a déclaré Traian Basescu mardi 21 septembre devant le Parlement. Les industriels et investisseurs craignent que l’annonce du Président n’accentue les craintes que suscitent la Roumanie, au lieu de les calmer.
« 70% du budget va directement dans l’aide sociale et les salaires des fonctionnaires. Où trouver l’argent pour investir ? » Le Président a expliqué que les hausses de salaires seraient possibles en combattant l’évasion fiscale et en augmentant la base d’imposition ; il a aussi affirmé que la crise actuelle ne justifiait pas le non paiement des impôts.
« Le message du Président suscitera des réactions négatives en chaîne, les problèmes ne se résoudront pas avec des discours publics », estime affirme Florin Pogonaru, président de l’Association des entrepreneurs roumains (AOAR). « Personnellement, je suis contre un nouvel accord avec le FMI », ajoute-t-il.
La Roumanie n’est pas sortie de la crise
Selon le chef de l’État roumain, l’accord avec le FMI tient de la crédibilité de la Roumanie, puisqu’à cause du déficit budgétaire et du déséquilibre économique la Roumanie ne peut pas obtenir des emprunts de long terme.
« Nous voudrions faire des emprunts à dix ou quinze ans mais le pays a déjà du mal à trouver des emprunts sur trois ans ». Cette année, le ministre des Finances a été obligé de retarder plusieurs ventes de titres d’État à cause des intérêts trop élevés demandés par les banques, étant donné que son prédécesseur, Sebastian Vladescu, n’a pas offert des rendements du leu, la monnaie nationale, supérieurs à 7%.
Selon Florin Andronescu, homme d’affaires et fondateur des cliniques Sanador, « le fait que personne ne nous accorde de prêt signifie que nous ne sommes pas encore sortis de la crise. Dans ces conditions, pourquoi FMI le ferait-il ? »
Le Président a annoncé le 20 septembre que « la Roumanie continuera de s’endetter, mais les emprunts ne se justifient pas s’ils ne sont pas destinés à couvrir des dépenses. Malheureusement, au début de l’année, il y a eu trop de primes offertes pour le 13e mois, et les dépenses ont augmenté de 20% dans l’administration publique locale. L’accord avec le FMI est un retour vers la réalité : nous n’avons plus les ressources nécessaires pour continuer au même rythme. Nous ne pouvons plus emprunter pour dépenser ».
Une priorité : réduire les dépenses publiques
Le Président a aussi exposé mardi 21 les contraintes budgétaires qui attendent la Roumanie dans les prochaines années. Il a affirmé que le pays a passé le pic de la crise économique, mais pas celui de la crise sociale et que la prudence doit donc rester de rigueur pour les années qui viennent.
« En 2011, l’économie enregistrera une croissance de 2% qui atteindra 3 à 4% dans les prochaines années. Malheureusement, ce ne sera pas assez, il faudrait une croissance moyenne d’au moins 5% par an. De plus, il faudra réduire progressivement le déficit budgétaire », a affirmé le chef de l’État.
Le Président a déclaré que le gouvernement devait privatiser les entreprises d’État non rentables, et coter en bourse les capitaux minoritaires qu’il détient dans d’autres sociétés. Il a aussi donné d’autres lignes directrices devant le Parlement, dont la nécessité d’attirer des capitaux privés dans les partenariats avec l’État.
D’ici la fin de l’année, il faudra mettre au point un système de taxe sur Internet et le budget 2011 devra refléter une hiérarchisation des priorités dans les investissements. « L’État finance 46.000 investissements. Pour pouvoir tous les couvrir, nous avons besoin de 40 milliards d’euros. Nous n’avons pas ces ressources, la seule solution est donc la hiérarchisation des priorités. La situation actuelle résulte de l’incohérence des gouvernements précédents : ils ont lancé des investissements par pur soucis électoraliste », a dénoncé le Président Basescu.
La chasse aux gaspillages, l’arlésienne
Le chef de l’État a soutenu que ce n’était pas seulement le manque d’argent qui posait problème mais aussi le gaspillage. « Nous avons des fonctionnaires qui gaspillent inutilement le temps et les nerfs des citoyens. Le système de santé et l’éducation ne sont pas assez financés. Cependant, les aides sociales pour la santé ont augmenté à quatre reprises ces dix dernières années, sans qu’il y ait d’améliorations visibles ».
Cela fait pourtant six ans que Traian Basescu est au pouvoir. C’est sa majorité qui gouverne, le gaspillage s’est donc produit sous ses yeux et c’est seulement maintenant qu’il en prend conscience ? Le chef de l’État a aussi avoué son inquiétude quant à l’allocation de 46% du budget d’État aux aides sociales, dans la mesure où 30 autres % sont utilisés pour payer les salaires des fonctionnaires.
Les entrepreneurs se sont montrés pessimistes face au discours du chef de l’État. Florin Pogonaru pense ainsi qu’il vaut mieux s’arrêter avant d’obtenir un nouvel prêt, qui n’aurait pas pour but d’introduire d’autres mesures que celles prévues dans l’accord actuel. Il a ainsi souligné que la Roumanie devait prendre des décisions qui ne soient pas nécessairement d’ordre financier, comme changer la législation du travail, réforme prévue dans l’accord actuel, mais qui n’a pas été menée.
L’absence de logique dans la hiérarchisation des priorités dans les mesures prises par le gouvernement ne fera qu’enfoncer le secteur privé dans la crise. L’homme d’affaires Florin Andronescu persifle : « pour nous accorder l’emprunt, le FMI devra être très convaincant parce qu’aucune banque ne prête sans garantie en retour. Les hommes politiques ne font que des affirmations politiques. Il y a deux mondes parallèles : la politique et les affaires, et je pense qu’il faudra trouver un interprète pour qu’ils puissent se comprendre ».