Désastre démographique en vue
Riche de ses ressources énergétiques et minières, la Russie souffre d’une maladie potentiellement mortelle : la dépopulation. Pour répondre à ce défi, ses dirigeants vont devoir définir des politiques volontaristes en matière de santé publique, d’éducation, de solidarité sociale, mais aussi d’immigration.
Où est donc passé le désir d’enfants ?
Alors que le taux de mortalité est dramatiquement élevé, la timide remonté de la natalité est bien insuffisante pour inverser la tendance. Résultat : la population se réduit chaque année de près de 900.000 individus. A ce rythme vers l’an 2150 il pourrait ne plus y avoir de Russe en Russie!
Aucun des journalistes ou démographes n’est capable de dire pourquoi les femmes font si peu d’enfants et avortent autant. Il y a quelques explications, comme les problèmes de violence conjugale, des appartements trop chers et trop exigus, des problèmes économiques, une anomie généralisée qui fait que la solidarité perd du terrain, un manque d’aide de l’Etat, mais enfin, en regardant les cartes, on se rend compte que c’est dans les régions plutôt pauvres du nord Caucase et de Touva que l’ont fait le plus d’enfants, régions où les “peuples autochtones” sont les plus nombreux.
Normalement, dans les autres pays du monde, la pauvreté va de pair avec une forte natalité, sauf en “Russie russe ». Les riches comme les pauvres font peu d’enfants. C’est “la croix russe“, selon certains démographes.
Dans ce contexte, il ne manque donc pas de « spécialistes », pour expliquer la nécessité du recours à l’immigration massive pour remédier à ce problème. Ainsi, pour le quotidien moscovite Nezavissimaïa Gazeta, compte tenu du vieillissement de la population et des problèmes concernant le système des retraites, la Russie n’a qu’un seul moyen d’améliorer sa démographie : l’immigration.
“D’ici à 2030, le pays aura besoin de 25 millions de travailleurs immigrés.”
Les autorités russes tentent d’inverser la tendance
Il y a six ans, lors de son second mandat, Vladimir Poutine a annoncé un vaste « projet fédéral démographique », lancé en 2005, s’appuyant sur une vigoureuse campagne médiatique appelant les russes à « faire des enfants pour la patrie ».
Prenant le taureau par les cornes, toute une série de mesures adaptées à la situation du pays ont été engagées par Moscou (poursuivies aujourd’hui par Medvedev), appuyées et relayées par les exécutifs régionaux, les administrations locales, les sociétés, afin de permettre aux jeunes couples d’avoir un second, voire un troisième enfant.
Ont été ainsi accordés des avantages fiscaux, des primes financières, des aides aux crédits et au logement, des prêts pour l’achat de logements qui peuvent être effacés à l’occasion de la naissance d’enfants, des bons d’achats pour les jeunes ménages dans les grands magasins… Mesures qui ont accompagné, parallèlement , une vaste politique sanitaire, notamment de lutte contre l’alcoolisme.
Politique payante
En 2009, la population a, pour la première fois depuis 15 ans, augmenté en Russie et, autre « grande première » depuis 1998, le nombre de décès sur l’année 2010 devrait être inférieur à 2 millions. L’accroissement naturel de la population a été enregistré dans 25 territoires en 2009, contre 21 en 2008. Il a été pareillement constaté un accroissement des naissances dans 70 territoires de la Fédération et la réduction des décès dans 73 territoires sur 83.
Selon les différentes prévisions du ministère de la santé Russe, l’hémorragie de la population russe, officiellement un peu moins de 142 millions de citoyens au 1er janvier 2010, devrait être stabilisée, sans recours massif à l’immigration, pour atteindre, en 2030, 128 millions d’habitants, selon une prévision estimée « mauvaise » par le ministère de la santé, et même 148 millions, selon une prévision dite « haute » de ce même ministère.
Bref, nous sommes loin des estimations de l’ONU qui, non contente dans son « fameux » rapport de 2001 de prôner l’arrivée massive de plusieurs dizaines de millions d’immigrés supplémentaires en Europe de l’Ouest pour pallier au déficit des naissances, a affirmé dernièrement que la population russe devrait atteindre 110 millions, voire 100 millions d’habitants dans quarante ans…
Source : Courrier International (article 1 et article 2)
(Merci à Erwinn)