Par Bill Bonner
Il faut s’attendre à un miracle. Ou à une fraude.
Pour de l’argent imprimé — de l’argent créé à partir de rien –, il est impossible de générer de la richesse réelle. Ce n’est que du papier. Ou même moins. Ces jours-ci, ce n’est rien de plus qu’une bribe de l’imagination d’internet.
Un guichetier tape un chiffre sur son clavier. Et hop ! Une banque à des milliers de kilomètres de là reçoit un milliard de dollars. Le monde en est-il un centime plus riche ? Bien sûr que non. Même immeubles. Mêmes entreprises. Même production. Même pouvoir d’achat.
Mais attendez… dans ce cas, que font vraiment ces milliards de dollars ?
Ah, ça… Eh bien, ils ressemblent à du vrai argent. Ils agissent comme du vrai argent. Et ils achètent des choses — comme du vrai argent. Et, incroyable mais vrai, les gens pensent que c’est du vrai argent.
Ils se sentent plus riches. Ils dépensent. Ils investissent. Ils spéculent. Exactement comme s’ils avaient plus d’argent réel. Si cet argent bidon parvenait à créer un authentique boom, ce serait un miracle. Mais on dirait que c’est exactement ce sur quoi les investisseurs parient.
Le Dow est passé au-dessus des 11 000 points la semaine dernière. Le S&P 500 se vend à un PER 50% plus élevé que sa moyenne de long terme. Les investisseurs doivent penser que les entreprises vont se développer 50% plus rapidement que durant la majeure partie du 20ème siècle.
Quoi ? Voyons voir…
… Nous sommes dans les premières phases d’une Grande correction…
… on trouve encore l’équivalent de 20 000 milliards de dollars de créances pourries à éliminer…
… le chômage est à des niveaux qu’on n’avait plus vus depuis la Grande dépression…
… tant de maisons américaines risquent la saisie que les banques doivent cesser de les reprendre…
… le peu de “croissance” qu’on enregistre semble provenir uniquement du gouvernement. Et le gouvernement lui-même est en bonne voie pour une crise de dette…
Les choses ne vont pas en s’améliorant. Le gouvernement américain est dans le rouge à tel point qu’il ne pourra peut-être jamais en sortir. Il emprunte un dollar pour chaque dollar d’impôt qu’il encaisse. Il continue donc de creuser son trou.
▪ Et début novembre, la Fed devrait annoncer qu’elle se joint à la fête de l’assouplissement quantitatif. C’est ce qui retient l’attention des investisseurs. C’est ce sur quoi ils parient — toujours plus d’argent brûlant de la part de la Fed.
“Le travail de la Fed, c’est de retirer le bol à punch” lorsque la fête devient trop folle, disait William McChesney Martin, ancien chef de la Fed. Au lieu de ça, elle verse encore plus d’alcool et offre les clés de la voiture.
Les investisseurs sont convaincus qu’elle annoncera une nouvelle vague d’assouplissement quantitatif en novembre. Ils pensent que les chiffres devraient se situer entre 100 et 1 500 milliards de dollars. Une grosse somme, en d’autres termes.
Pourquoi ? Parce que l’économie ne s’améliore pas. Parce que c’est une Grande correction. Parce que la Fed est persuadée qu’elle peut injecter de l’argent et stimuler “l’instinct animal” des Américains. Et parce que ce sont tous des benêts, en réalité.
Si vous pensez qu’on peut vraiment améliorer la situation en ajoutant de l’argent bidon, pourquoi ne pas en ajouter beaucoup plus ? Ha ha… pas grave, oubliez ça.
On ne fait que compter sur un miracle… ou une fraude. Nous ne compterions pas sur un miracle. Mais nous ne parierions pas contre une fraude. Ajouter de l’argent bidon ne peut créer de la vraie prospérité. On n’engendre rien avec du rien. Mais ça peut créer un boom… et une bulle… sur les actifs spéculatifs. C’est-à-dire que ça peut fonctionner comme une fraude. Les spéculateurs prennent ce nouvel argent brûlant et font grimer l’or, le cuivre, le platine ou les actions chinoises. Tout grimpe alors que cet argent passe de main en main… jusqu’à ce qu’il brûle quelqu’un.
Pour l’instant, nous nous inquiéterions un peu du fait que les investisseurs ont déjà pris en compte la rumeur de ce nouvel assouplissement quantitatif. Si la Fed annonce cette mesure attendue, les investisseurs vont probablement vendre. La seule chose qui ferait grimper les cours serait que la Fed en fasse plus que ce qui avait été anticipé… c’est-à-dire qu’elle se lance à corps perdu dans la bataille contre le ralentissement.
Et là, on en verrait, des accidents !