En 2020, la dette des États-Unis devrait, au bas mot, atteindre les 20.000 milliards de dollars.
Et si les États-Unis tiraient un trait dessus sans la rembourser ?
Telle est la thèse d’Édouard Tétreau, ex-analyste financier pendant les folles années Internet et aujourd’hui conseil en stratégie et communication financières.
Même si cette éventualité paraît difficile à envisager, il faut peut-être la prendre au sérieux. En 2000, alors analyste au Crédit lyonnais, Édouard Tétreau n’avait-il pas été le premier à rédiger une note intitulée “Alerte sur les valeurs médias européennes : prenez vos e-profits avant un éventuel krach.”
Deux ans plus tard, il avait écrit une note sur Vivendi Universal où il évoquait la mauvaise gestion et les scénarios possibles, du raid boursier jusqu’au débarquement pur et simple de son PDG, Jean-Marie Messier.
“Les USA ne rembourseront jamais leurs dettes… ils n’ont pas d’autre choix que de rembourser en monnaie de singe. Quand on commence à se faire la guerre sur les monnaies, la guerre tout court finie par très vite arriver. 20.000 milliards de dollars est une estimation très optimiste.”
“Ardoise magique »
Son précédent livre, “Analyste : au coeur de la folie financière » (Grasset, 2005) était une plongée sans complaisance dans les marchés financiers. Sa nouvelle livraison relate ses trois années aux États-Unis. Trois ans pendant lesquels Édouard Tétreau, parti en 2007 pour développer une filiale du groupe Axa, en a profité pour sillonner les États-Unis. Du nord au sud, d’est en ouest en passant par le centre. Avec un objectif : comprendre ce pays. Le résultat : un témoignage sans concession mais sans jugement intempestif.
Souvent drôle, grinçant, candide parfois. 20.000 milliards de dollars. Chronique de la folie américaine est un voyage au coeur des excès : excès d’argent (56.000 milliards de dollars de patrimoine, soit environ le PIB du monde entier), de nourriture (100 millions d’obèses, dont un enfant sur six), de religion (30 % croient mot pour mot à ce qui est écrit dans la Bible), des armes (250 millions) ou encore du chacun pour soi poussé à l’extrême (dans 46 des 50 États, la notion juridique de non-assistance à personne en danger n’existe pas)… Mais, au terme de ce voyage, Édouard Tétreau est arrivé à une conclusion sans équivoque : les États-Unis ne rembourseront pas leur dette.
“20.000 milliards attendus pour 2020, c’est un siècle de salaires pour toute la fonction publique !” Sans compter les 56.000 milliards de dollars d’engagements de retraites non financés. Édouard Tétreau appelle cela “l’ardoise magique.»
“Chaque billet émis par la Réserve fédérale a “force libératoire pour toute forme de dette publique ou privée”,” rappelle-t-il. Il n’y a plus qu’à faire marcher la planche à billets, et “l’Amérique se sera acquittée de toutes ses dettes (…) sans effort aucun.” Mais en faisant payer la facture au monde entier.
Un scénario apocalyptique, extrême, qui mènerait à la faillite de la planète. La crise financière de 2008 : une bagatelle, en comparaison.
Au début de son périple, Edouard Tétreau avait presque enterré l’Amérique et pensait intituler son livre : “Ci-gisent les États-Unis d’Amérique, 1776-2008». A tort. L’Amérique, première responsable de cette crise, “est repartie de plus belle». Comme s’il ne s’était rien passé. “Sa vitalité démographique et démocratique, sa capacité à innover et à se renouveler était intacte.” Édouard Tétreau se montre à la fois effrayé par cet égocentrisme à outrance et émerveillé par cette faculté à renaître sans cesse, ce qu’il appelle le “can do attitude». La “devise” des États-Unis tient en huit lettres : just do it !