Par Cyrille Lachèvre
30 milliards d’euros d’économie. Le chiffre a été lâché mardi sur France inter, par le ministre du Budget François Baroin : l’an prochain, il faudra faire 30 milliards d’euros d’économie pour faire passer le déficit public de 6% du PIB à 4,6%. Pour ramener, en 2011, de 7,7% à 6% du PIB le déficit public, l’effort demandé est de 40 milliards d’économie.
Apparemment donc, s’il reste encore de nombreux efforts à fournir l’an prochain, le lecteur non averti pourrait avoir la sensation que le plus dur sera à faire cette année et que la suivante sera plus tranquille.
Dans la réalité, il n’en est rien. L’effort qu’il faudra accomplir en 2012 est colossal, sans commune mesure avec celui de cette année. Pourquoi ? Parce que, grosso modo, au cours des douze prochains mois, le véritable effort sur la dépense publique ne sera pas de 40 milliards mais, dans le meilleur des cas, de 17 milliards. Comment expliquer une telle différence ? Parce que les 40 milliards mélangent les choux et les carottes.
Selon les calculs de Bercy, le retour de la croissance (prévue à 2% cette année, contre 1,6% en 2010) apportera mécaniquement 7 milliards de recettes fiscales en plus. Surtout, nous réaliserons, en 2011, 16 milliards d’économie par rapport aux dépenses consacrées à la relance en 2010. Dit autrement, 16 milliards de dépenses engagées l’an dernier ne le seront plus cette année. Bref, le véritable effort ne sera pas de 40, mais de 17 milliards.
Et encore. Sur ces 17 milliards, plus de 11 viennent d’une suppression ou d’un durcissement du plafonnement des niches fiscales pour les entreprises comme pour les ménages (termes polis pour masquer des hausses d’impôts). Au final, donc, la baisse du train de vie de l’état sera inférieure à 7 milliards. Comparé à 356 milliards de dépenses publique, cela représente… 2% d’économie !
On perçoit très vite la difficulté de l’équation pour François Baroin et ses équipes, à partir de l’automne prochain, lorsqu’il devra présenter le budget 2012 : 30 milliards d’économies, c’est trouver 4 à cinq fois plus d’économie dans le train de vie de l’État, ou bien multiplier par trois le coût du durcissement des hausses d’impôt, ou bien faire un mélange des deux. Bon courage lorsqu’il faudra annoncer 20 milliards de ristournes en moins sur les niches fiscales, à quelques mois des élections présidentielles…
Bercy va donc devoir se concentrer davantage sur la baisse des dépenses publiques. D’ailleurs, la fameuse révision Générale des Politiques Publiques (RGPP), qui regroupe quelques hauts fonctionnaires, parlementaires et personnalités économiques sous l’égide de Claude Guéant et de Jean-Paul Faugères, respectivement secrétaire général de l’Elysée et directeur de cabinet de Matignon, a été discrètement relancée il y a quelques jours. Signe que l’Etat se prépare à lancer une nouvelle vague de baisse de train de vie de l’Etat.
Mais quelles seront ses marges de manœuvre, à cinq mois d’une présidentielle qui s’annonce acharnée ? Comment réduire les dépenses publiques sans toucher aux prestations sociales ? 30 milliards ont beau faire moins que 40 milliards, il y a des chiffres trompeurs !