Leur nombre approche le millier. Il pourrait y en avoir plus tant les témoignages affluent chaque jour sur les forums d’internet. De tout le Languedoc-Roussillon, berceau de l’affaire, et de la France entière. Et c’est justement par la toile que ces internautes disent avoir été bernés. Tous sont commerçants, artisans, associations et prétendent être victimes d’une escroquerie.
Le mode opératoire était toujours le même. Simple et efficace. Un commercial se présente et propose la construction d’un site web, vitrine de leurs activités, qu’une société appelée Odévia mettra en ligne. Gratuitement.
« On devait payer 10 000 €, par mensualités sur 48 mois, pour l’ouverture et la maintenance du site, mais on avait l’assurance d’être remboursés. » Parce que sur le portail en question, un espace publicitaire est loué à une autre société, Publiciweb, client d’Odévia. Le loyer de cet hébergement, reversé au commerçant ou à l’artisan, couvre intégralement la mensualité avancée. « On ne perdait pas d’argent ».
L’affaire roule, car une fois leurs signatures apposées sur le contrat de service, le couple de restaurateur aura bien son site sur la toile. Le loyer lui sera versé. Au moins les deux premiers mois.
Dès octobre 2010, en effet, tout se corse. Publiciweb n’honore plus son hébergement. Le gérant d’Odévia se veut rassurant auprès de ses clients. Les soucis de trésorerie vont vite se régler. Pas vraiment. « En vérifiant mes comptes, j’ai vu qu’une société de crédit, dont je n’avais jamais entendu parlé, prélevait les mensualités », confie Yvette, à la tête d’une mercerie dans le Biterrois. Même constat pour cet artisan à Aigues-Vives dans l’Aude : « Je n’ai pas passé de contrat avec cette société de leasing, dont on ignore la responsabilité dans l’histoire. Or, c’est bien ma signature sur l’autorisation de prélèvement ! ». Beaucoup ont fait opposition aux ponctions, porté plainte en gendarmerie ou au commissariat.
« On se regroupe pour se faire entendre », souligne ce commerçant de Marseillan. « Il semble que les commerciaux, qui nous ont démarchés ont aussi été trompés et jamais rémunérés pour leur travail. » Le Narbonnais Me Frédéric Pinet, l’un des avocats des victimes, a rassemblé nombre de plaintes en vue d’une action en justice, et est contacté tous les jours par de nouvelles personnes. « C’est énorme. Les termes du contrat étaient respectés au début, alors les commerçants vantaient les mérites d’Odévia. Le bouche- à-oreille a bien fonctionné. »
L’argent envolé serait conséquent. Le cerveau de l’opération, à la fois gérant d’Odévia et de Publiciweb, semble avoir disparu de la circulation.