Reprenons, la crise financière de 2008 a amené les états à coordonner leurs efforts autour de plans de relance volontaristes et à travers des organes de décision comme le G8 ou le G20. Cette belle coopération internationale a pris fin en 2010.
L’unanimité a fait place au retour progressif des intérêts nationaux. Face aux déficits budgétaires et à l’augmentation faramineuse des dettes souveraines les États cherchent des solutions sous la pression des marchés, des agences de notation mais également sous la pression des flux d’investissement de plus en plus importants et rapides.
Désormais à chaque État son objectif. La Chine doit maintenir sa capacité exportatrice qui représente la majorité de son PIB, le marché intérieur chinois n’étant pas encore en mesure de prendre le relais. Les États-Unis souhaitent faire baisser le dollar de façon significative afin de doper leurs exportations et obtenir ainsi un surcroît de croissance indispensable pour relancer leur économie affaiblie.
Les pays émergents font face à la hausse de leur devise en raison de la baisse du dollar et d’investissements occidentaux massifs. Il s’agit de centaines de milliards de dollars chaque année que les investisseurs préfèrent parier sur les émergents au potentiel de croissance dynamique plutôt que sur leurs vieilles économies nationales à la croissance au mieux poussive.
Quant à la zone euro elle subit de plein fouet son incapacité à définir une politique monétaire forte et indépendante, en dehors du sacro-saint objectif unique de « stabilité des prix » dont le Président de la BCE a rappelé encore ce week-end l’importance à ses yeux.
L’euro a été conçu comme une monnaie d’échange au sein de la zone euro et non comme une arme économique pouvant être utilisée à l’égard des autres zones monétaires. Bref, force est de constater que, depuis quelques mois, de nombreux pays sont rentrés de plein pied dans ce qui est qualifié de « guerre des monnaies ».
Du Brésil qui vote une taxe de 6% sur les achats d’obligations par des étrangers, à l’Inde qui interdit à un non-ressortissant de détenir des actions, ou encore le Vietnam qui impose une durée minimale d’un an à tout investisseur étranger, sans oublier la Chine qui empêche l’appréciation de sa monnaie le yuan. Bien sûr il y a les États-Unis qui impriment autant de dollars que nécessaire pour faire baisser le cours de leur monnaie, puis les Suisses qui rachètent du dollar et de l’euro pour faire à leur tour baisser, puis, puis…
En réalité tous les pays partagent un même objectif, améliorer leur compétitivité en faisant baisser leur monnaie. Cela revient également à dire que tous les pays souhaitent voir leur monnaie baisser en même temps… ce qui est par définition contradictoire dans un système de change flottant « relatif ».
Si tout baisse en même temps, tout reste équivalent… C’est donc un cycle majeur de baisse généralisée des monnaies par rapport aux actifs réels qui vient de s’engager. Cela signifie un risque accru d’augmentation de l’inflation dans les mois à venir via notamment les matières premières. Au-delà du retour de l’inflation, cette guerre des monnaies est un protectionnisme qui ne veut pas dire son nom. Pour mémoire le protectionnisme est un gros mot et un concept totalement interdit dans un monde régi par le dogme libre-échangiste.
Or les actions entreprises par un nombre grandissant d’ tats et non des moindres sont de plus en plus anti-libérale et anti-libre échange. Ces actions préfigurent sans doute celles, inéluctables qui viendront ensuite essayer d’enrayer les dégâts occasionnés par les excès d’une mondialisation réalisée d’une façon trop rapide. Ces actions sont et seront porteuses de dangers économiques d’abord puis géopolitique à plus long terme si elles ne sont pas réalisées dans un cadre coordonné entre tous les grands pays.