La moitié des firmes françaises ou filiales de groupes hexagonaux installées en Côte d’ivoire ont déjà procédé à une mise en chômage technique de leurs personnels.
Habituées à la gestion de crise en Côte d’Ivoire depuis 2002, les entreprises françaises ou filiales de groupes tricolores implantées dans ce pays accusent de plus en plus le coup depuis les troubles post-électoraux de la présidentielle du 28 novembre. Selon des sondages régulièrement réalisés par la Chambre de commerce et d’industrie française en Côte d’Ivoire (CCIF-CI) auprès de ses adhérents depuis le début de cette nouvelle crise, les conditions d’activité se dégradent rapidement.
L’une de ces études, réalisée du 7 au 14 janvier, révèle que 88% des sondés – majoritairement des dirigeants de PME-PME – sont restés en Côte d’Ivoire, mais 9% envisagent de partir définitivement. 75% ont “allégé” leurs effectifs, sous peine de mettre leurs activités en péril. Près de la moitié des entreprises ont opté pour une mise en chômage technique, 28% pour des licenciements et 26% pour des réductions de salaires.
Tous les sondés ont subi une chute drastique de leur chiffre d’affaires depuis novembre, notamment en raison d’un mois de janvier “sinistré.” La baisse est de 25 à 50% pour 38% des firmes, et de plus de 75% pour 11% d’entre elles.
“Si la situation ne s’arrange pas, des effets collatéraux sans précédent sont attendus,” précise l’étude. Pour couronner le tout, 93% de ces dirigeants estiment avoir des rapports très moyens, voire mauvais avec les administrations ivoiriennes. Aucun opérateur n’envisage une reprise rapide de l’activité économique. Du moins pas avant six mois. Tous évoquent un lent pourrissement de la situation…
L’Eldorado du marché de la sécurité
L’insécurité en Côte d’Ivoire ne fait pas que des malheureux. Pour les sociétés de sécurité privées, c’est carrément une aubaine, même si ces dernières préfèrent rester discrètes. Libanais, Ivoiriens, Français… : toutes les nationalités sont présentes sur ce secteur à forte croissance et opèrent souvent dans la mouvance de Laurent Gbagbo ou d’Alassane Dramane Ouattara. Certaines entreprises n’hésitent d’ailleurs pas à embaucher les partisans des deux hommes politiques en guise de personnels.
Le général de gendarmerie Joseph Tanny, proche de l’ancien président Henri Konan Bédié “HKB”, est le puissant patron de Bip Assistance. De son côté, l’homme d’affaires Charles Kader Gooré a racheté la firme Omeifra au Français Daniel Coin. Ancien militaire, son compatriote Jean Charaux est à la tête de la Société de sécurité industrielle, spécialisée dans la protection des complexes industriels. Le maître es-sécurité privée dans la capitale économique ivoirienne demeure Frédéric Lafont. Ses deux entreprises – Vision et Risk Group – couvrent les activités allant de la surveillance à la protection civile, en passant par les évacuations d’urgence.
La société 911 Security est dirigée par Carole Guignery, ressortissante française vivant en Côte d’Ivoire. Son compagnon Stephen Capraruolo a monté, quant à lui, Locate, une firme spécialisée dans la géolocalisation. D’autres entreprises comme Flash intervention, Koneco sécurité, Viga assistance, Guardian ou Black Hawk ont pignon sur rue. Pour leur part, plusieurs hommes d’affaires libanais ont créé Sécurité services et 116 sécurité afin, notamment, d’assurer la protection de leurs réseaux commerciaux.
Enfin, l’ambassade des États-Unis à Abidjan est protégée par la filiale locale de la multinationale anglo-danoise G4S, leader des solutions intégrées de sécurité.
La Lettre du Continent N° 604 (Version papier)
(Merci à Erwinn)