Contrairement aux idées reçues, la France se situe dans la moyenne des pays développés en nombre de fonctionnaire par habitant et en poids des dépenses de rémunération dans le PIB. La preuve en chiffres.
Face au déficit croissant des finances publiques, la question d’une éventuelle «sur-administration» est souvent posée en France. «La France compte trop de fonctionnaires», répète à l’envi Nicolas Sarkozy depuis qu’il est au pouvoir. Un argument qui justifie aux yeux du chef de l’Etat la politique de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux à la retraite.
Parce qu’elle est légitime, cette question mérite d’être creusée. Trop de fonctionnaires par rapport à qui ou à quoi ? Aux autres pays développés ? A la population française ? Au budget de l’Etat ? Une enquête exclusive du Centre d’analyse stratégique (organisme rattaché à Matignon) apporte, pour la première fois, des éléments de comparaison dans une perspective internationale. Ce «tableau de bord de l’emploi public», publié mardi 8 février, bouleverse les idées reçues.
90 fonctionnaires pour 1000 habitants
La France comptait en 2008 entre 5 et 6 millions de fonctionnaires (le million de différence tient à la prise en compte de l’emploi dans les organismes privés à financement public types établissements publics d’aménagements et les entreprises semi-publiques type SNCF ou Aéroports de Paris), selon les chiffres les plus récents de Bercy. L’emploi public représente ainsi 20 à 25% du total de l’emploi en France. Soit environ 90 emplois publics pour 1000 habitants. Un taux d’administration qui se situe dans la «moyenne haute» des pays de l’OCDE, selon le rapport du CAS.
La France se situe ainsi loin devant le Japon (40 emplois publics pour 1000 habitants) et l’Allemagne (50 pour 1000) mais loin derrière le Danemark et la Norvège (160 pour 1000). Elle est au même niveau que le Royaume-Uni. Les auteurs du rapport ajoutent que «si la France apparaît en situation relativement haute du point de vue du nombre d’emplois publics par habitant, elle recourt moins que d’autres à la sous-traitance» (moins de 5% du PIB), contrairement aux pays anglo-saxons (9% du PIB aux Etats-Unis et au Canada, 12% au Royaume-Uni) et aux pays nordiques (9% en Finlande, en Suède et au Danemark).
Les rémunérations publiques représentent 10 à 12% du PIB
En 2009, les dépenses de personnel (salaires, cotisations et prestations sociales) de l’Etat, des collectivités locales et des hôpitaux se sont élevées à 208 milliards d’euros. L’équivalent de 10 à 12% du PIB. Là encore, la France se situe dans la moyenne de l’OCDE, où les dépenses de rémunération publiques varient de 3,5% du PIB au Japon à 17% au Danemark. Ce taux connaît une diminution «sensible» en France, souligne l’enquête du CAS.
Dans la plupart des pays de l’OCDE, l’essentiel des emplois publics (entre 45% et 76% des rémunérations publiques versées) est concentré dans trois secteurs: l’éducation, la santé et la protection sociale. Seuls les Etats-Unis et la Grèce consacrent plus de 10% de leurs dépenses publiques à la défense, contre 6% en moyenne dans les autres pays de l’OCDE. La France présente un profil identique avec 31% des rémunérations publiques versées à l’éducation, 18% à la santé et 10% à la protection sociale et 8% à la défense.
12 enseignants pour 100 élèves
Dans l’éducation, la France se situe à un degré intermédiaire en ce qui concerne le taux d’administration avec 30 emplois publics pour 1000 habitants ou 12 pour 100 élèves, entre le Japon (15 emplois pour 1000 habitants ou 8 pour 10 élèves) et le Danemark, le Royaume-Uni ou la Suède (respectivement entre 35 et 50 pour 1000 et 15 à 20 pour 100). Néanmoins, la France affiche des taux d’encadrement dans l’enseignement primaire et supérieur parmi les plus faibles des pays de l’OCDE.
Dans le primaire, la France ne mobilise que 5 enseignants pour 100 élèves (en comparaison, ce taux est de 10% en Grèce et en Italie). Dans le secondaire, en revanche, la France est dans la moyenne (8 enseignants pour 100 élèves, contre 6% en Allemagne et 12% en Suède). Dans le supérieur, la France affiche un taux d’encadrement de 5%, équivalent à la Grèce, contre 9% en Allemagne et 11% en Suède. Une récente étude de l’OCDE indique que la France est en 18e position en termes de performance de ses élèves, avec une note qui atteint tout juste la moyenne.