Par Cyrille Lachèvre
La prochaine crise financière mondiale aura lieu en 2015. Tremblez braves gens, le scénario est déjà écrit ! C’est le groupe américain Oliver Wyman – une société spécialisée dans le management des risques industriels – qui le prédit dans une étonnante analyse. La crise, explique-t-il, viendra de l’éclatement de la bulle des matières premières.
En effet, un double phénomène serait actuellement à l’œuvre. D’abord, l’activité bancaire est repartie de plus belle et se concentre sur les matières premières. A la fois parce que les banques participent du mouvement géant de fusion acquisition qui secoue l’industrie minière, mais surtout parce que les hedge funds, qui n’ont plus d’espoir de faire beaucoup de bénéfices avec les actions ont tendance à se porter vers les marchés qui grimpent, en l’occurrence ceux des commodités.
La hausse de ces marchés pousse en retour les entreprises à financer des projets d’exploration et de production de plus en plus coûteux. Ainsi le mouvement se poursuivra-t-il jusqu’à ce que la machine se grippe et que le mur s’effondre. Pour le consultant américain, la bulle éclatera lorsque la poussée inflationniste conduira la Chine à relever très sérieusement ses taux d’intérêt et à laisser sa devise s’apprécier, ce qui provoquera un ralentissement économique dans le pays. Ceci débouchera alors sur une chute de la demande pour les matières premières et un effondrement de leur prix.
Les Etats, mal remis de la crise du risque souverain, n’auront pas les moyens d’aider les banques qui se seront trop exposées à ces marchés. La catastrophe pourrait être interplanétaire et atteindre, voire dépasser, le coût des subprime car cette fois-ci les émergents seront directement touchés !
Ce scénario n’a rien de particulièrement novateur et n’est même pas particulièrement génial…ce qui le rend d’autant plus crédible. Mais le plus intéressant, dans l’analyse proposée, c’est qu’elle se penche sur quelques phénomènes en train de se développer et qui ne lassent pas d’inquiéter.
Le premier est le développement du « shadow banking », la « banque de l’ombre », en français. Cela touche l’activité de titrisation, d’intermédiation des crédits, de transformation de la liquidité… autant d’opérations échappant au radar des régulateurs et qui depuis 1980 ont tendance à se développer beaucoup plus rapidement que les activités bancaires normales.
Les règles de contrôle se sont pourtant durcies, mais au fur et à mesure qu’elles sont décidées, les banquiers trouvent des moyens de développer de nouvelles activités en dehors des radars. Et dans les matières premières, la loi de la jungle prévaut encore.
Le deuxième enseignement est que l’engouement pour les matières premières possède de plus en plus les caractéristiques d’un vrai mouvement spéculatif. Une enquête menée par Barclays révèle ainsi que 76% des investisseurs prévoient davantage de flux de liquidité dans les commodités en 2011 qu’en 2010. Lorsque l’on prévoit que son voisin va acheter une maison, on en fait de même avant lui, pour pousser les pris à la hausse et réaliser ainsi une confortable plus value.
Oui « mais cette fois-ci c’est différent », assurent les investisseurs… oubliant, comme le rappelle Oliver Wyman que cette fois, ils jouent simplement « l’histoire d’une croissance économique forte venant de chine créant une demande durable pour les matières premières ». Or chacun sait que les arbres ne montent pas au ciel.
L’analyse est donc inquiétante, car tout à fait valable. On en vient à se poser simplement une question. Pourquoi 2015 et pas 2012 ?