Face à la «résurgence d’une droite nationaliste et xénophobe» en Europe, Bernard Guetta ne voit qu’une seule parade : une «démocratie européenne».
L’abandon de l’unité européenne décuplerait les maux dont souffrent aujourd’hui les Européens.
«Fasciste» aurait hier suffi à disqualifier ces nouvelles droites mais ce n’est plus le cas aujourd’hui car très peu de leurs électeurs sont des chantres de la peste brune. Certains, bien sûr, l’ont été ou le sont encore mais cette résurgence d’une extrême droite n’est pas un simple retour aux années 30. C’est un nouveau imprégné d’ancien mais une nouveauté.
Car qui sont ces nationalistes ? Dans une nouvelle convergence, ils sont faits d’ouvriers et employés confrontés à la raréfaction de leurs emplois, d’électeurs de gauche basculant à l’extrême droite au nom de l’anticapitaliste, de féministes en lutte contre l’islam ou d’homosexuels néerlandais qui ont bâti un parti antimusulman car ils se voyaient déjà pendus, comme à Téhéran, par les immigrés nord-africains. La mosaïque est improbable mais tous se vivent, c’est un fait, comme des défenseurs des acquis sociaux, de l’évolution des mœurs ou des deux : d’une modernité progressiste ébranlée par la mondialisation. […]
Ce cinquième des Européens qui votent nationaliste et la masse, autrement plus importante, de ceux qui ne sont plus choqués par ce vote sont mus par une nostalgie de l’âge d’or de l’Europe occidentale, de ces trois décennies d’après-guerre où la reconstruction tirait la croissance vers un avenir que l’on croyait toujours meilleur. […]
Si l’âge d’or est révolu, c’est d’abord parce que le rapport de forces s’est inversé entre le capital et le travail. Il s’agit donc de le rééquilibrer et de reconstruire, pour cela, un Etat arbitre. C’est la tâche de l’heure, une absolue priorité, mais ce ne sont pas les Etats-nations qui pourraient peser face à un marché mondialisé. Seule une puissance publique continentale le pourrait, pour peu que la démocratie européenne fasse émerger des majorités qui le veuillent. […]