Quarante-cinq d’entre eux, en rétention, ont repris leur périple.
Ils franchissent rapidement la grille du centre de rétention administrative du Canet et se mettent à marcher, comme par réflexe. Leur but: la gare de Marseille, sans même savoir où elle se trouve, sans pouvoir demander leur chemin, ne parlant pas un mot de français. Il y a quelques semaines, Ahmed, Farat et les autres se sont jetés dans un bateau après s’être délestés de tout leur argent auprès d’un passeur tunisien.
Puis ils ont connu la traversée de la Méditerranée dans des conditions d’infortune, l’île de Lampedusa et, hier matin, leur comparution devant le juge des libertés et de la détention de Marseille. Avant d’être tous libérés en raison d’une procédure d’interpellation jugée irrégulière. Comme ses quatre compatriotes, Ahmed, né il y a vingt-et-un ans à Sfax, a été interpellé, dimanche, à la gare de Menton, à la descente du TER en provenance de Vintimille. “Qu’est-ce que vous y faisiez?”, demande la juge.
L’interprète traduit la réponse : “Je voulais rentrer en France pour retrouver mon frère.” – “Vous savez qu’il faut des papiers pour rentrer en France?” – “Les autorités italiennes nous ont informé comme quoi on pouvait circuler avec les papiers qu’ils nous ont donnés.” Tous ont en poche un carnet vert type passeport baptisé titre de voyage de la République italienne et une carte plastifiée d’autorisation provisoire de séjour de six mois, accordée par la mairie de Rome pour motifs humanitaires.
Farat, le second à comparaître, dit qu’un ami lui a payé le billet de train, qu’il va essayer de repartir en Tunisie mais n’a pas d’argent. L’audience ne s’éternise pas: les cinq Tunisiens sont tous remis en liberté. Le délai de presque six heures entre la notification, à la gare de Menton, d’un arrêté de placement en rétention et la notification de leurs droits, au centre de rétention à Marseille est jugé “excessif”. […]