Ils seraient 60 Tunisiens à vivre en toute clandestinité dans les quartiers de Toulouse. Ne parlant pas français, cherchant du travail, ils dorment à la belle étoile dans les parcs depuis plus d’un mois. Chahid (1) a 35 ans. Les yeux lessivés, les joues mal rasées, il en parait au moins dix de plus. Quitter Sidi Bouzid en Tunisie n’a pas été simple. Là-bas, dans sa ville où un étudiant s’est immolé par le feu et a déclenché la révolution du jasmin, il n’avait pas grand chose. Ici, dans les rues des quartiers du Mirail, il n’a rien… Comme ses trois amis. Ils seraient une soixantaine, 80 selon certains, à être arrivé de Tunisie à la suite de la révolution en passant par l’île de Lampedusa, en Italie. (…)
« J’ai embarqué dans un bateau. A bord, nous étions 234 », raconte Kazem, 36 ans. Chahid se souvient qu’ils étaient 165. « La mer était très agitée. Il y avait beaucoup de vent… C’était horrible », confie succinctement Kazem. Lors de cette traversée, un de ces voyageurs de fortune a vu son frère tomber à la mer. Malgré ses pleurs, ses protestations, le barreur a refusé de faire demi-tour. « Pas le temps », lui a-t-il dit alors que son frère s’enfonçait dans les flots. (…) « Ici, on pensait avoir du travail. Mais, il n’y a rien, rien », déplore Bilal, 36 ans. Ne parlant pas la langue, n’ayant pas de papiers, ils sont terrorisés à l’idée de se rendre à la préfecture ou au commissariat. Figure des quartiers du Mirail, Mourad Gherbi demande : « Que peut-on faire ? Il n’y a pas d’association pour les aider. A Paris, mais aussi à Marseille, les collectivités se sont bougées. A Toulouse, tout le monde ferme les yeux ». Tout le monde ? Pas vraiment. Récemment, une association de quartier a laissé son local à ceux qu’on nomme « les enfants de Lampedusa ». « Ils ont pu se faire à manger durant trois semaines », confie un habitant du quartier.
Merci à Baboxi