Maurad Ghazli, ex-UMP déçu et collaborateur du site islamique Oumma.com, décrypte l’appel du maire de Sevran.
L’appel du maire de Sevran est-il une provocation ?
Pas du tout, il a raison. On ne peut pas envoyer des milliers d’hommes en Afghanistan ou en Côte d’Ivoire et laisser une atmosphère de guérilla dans nos villes.
On ne peut pas proposer l’excellence de nos forces de l’ordre aux Tunisiens et être incapable de le maintenir en France.
C’est à se demander si le pouvoir ne se nourrit pas de cette situation.
Il ne se passe pas une semaine sans un règlement de compte à la Kalachnikov. Que pensez-vous des réponses policières ?
Les policiers n’en peuvent plus et la stratégie de leur hiérarchie est complètement inadaptée, notamment avec l’envoi de CRS ou les opérations dans les cages d’escalier du nouveau préfet de Seine-Saint-Denis, le tout soigneusement médiatisé. Les CRS doivent intervenir sur des problèmes ponctuels. Pour le quotidien, il faut du gardien de la paix, qui comme son nom l’indique, rétablisse la paix. Mais pas des fliquettes qui se font impunément traiter de « fille de pute » par des Barracudas. Il faut des flics retaillés.
Pour passer le Kärcher ?
Cette histoire est l’une des plus belles mystifications de ces dernières années. Les jeunes savent qu’ils ne risquent rien. Encore moins qu’avant. S’ils se font prendre, ils passent au poste pour un rapport bidon juste bon pour les statistiques et un an après au tribunal face à une juge qui dit : c’est pas bien… Non, les flics doivent avoir de vrais moyens.
Quoi par exemple ?
Pas des hélicoptères, mais le droit de faire respecter les règles. A Moscou, personne n’ose toucher un policier, car la population les respecte. Il faut que les patrouilles soient filmées pour éviter les bavures, mais il faut aussi les autoriser à mettre des tartes pour se faire respecter. Mais pour cela, il faut du courage politique et le pouvoir se moque désormais des banlieues car l’urgence sociale s’est étendue depuis à toute la France.
Brice Hortefeux dénonçait l’été dernier la présence de 350 Ferrari dans le 93, un département pauvre mais florissant…
C’est une blague ! En début de semaine, le conducteur d’une Porsche a renversé une fillette à Sarcelles. Il avait 24 ans et avait fumé du cannabis. Croyez-vous que c’était un chef d’entreprise… Remarquez, le business ne s’est jamais aussi bien porté en France. Des centaines de Ferrari en Seine-Saint-Denis ? Mais c’est reconnaître leur impunité ! Sarkozy avait lancé les GIR, avec des policiers, douaniers et des inspecteurs des impôts. Mais combien sont-ils ? L’idée de mutualiser la lutte contre le trafic était bonne, mais cinq ans après, c’est pire. Les gros bonnets ne se cachent même plus. Mieux : ils investissent l’argent sale dans l’immobilier, les sandwicheries et les pizzerias. Ca leur coûtent un peu de TVA, mais ils gonflent leur chiffre d’affaires et blanchissent tranquillement des fortunes.