A Sevran, (Seine-Saint-Denis), le maire Stéphane Gatignon (EELV) a demandé l’intervention de l’armée dans la ville pour «faire cesser les règlements de comptes». Hacène Belmessous, auteur du livre Opération banlieues : comment l’Etat prépare la guerre urbaine dans les cités françaises (La Découverte, 2010), nous livre son analyse.
Y Faire intervenir l’armée, c’est acter l’échec du politique, celle qui fait sens et société. Cela reviendrait également à considérer la banlieue comme le territoire de l’ennemi intérieur.
Comment en est-on arrivé là ? Lorsque Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, diminue chaque année le nombre de postes d’enseignants dans les écoles publiques ; lorsque les habitants de ces quartiers se trouvent aplatis par la vision néo-libérale du territoire, sous perfusion sociale, comme le sont certains bénéficiaires du RSA, ou contraints de «vivre» avec des salaires de misère ; lorsqu’ils sont piégés par ces processus de discrimination à l’emploi, aux logements les plus valorisés, mais aussi dans l’accès aux services publics […]
Pourtant, l’idée qu’une intervention de l’armée règlera le problème n’est qu’un leurre. D’ailleurs les militaires que j’ai rencontrés au cours de mes recherches me l’ont dit : «On ne tire pas sur nos concitoyens».
Reste que les élus locaux se sentent piégés et doivent gérer la pénurie. Je pense que nous allons payer chèrement la fin de la politique de la ville, car c’est l’échec du droit commun.